Livre des procédures fiscales

Origine et décret n° 81-859 du 15 septembre 1981

Le Livre des procédures fiscales (LPF) a été institué par le décret n° 81-859 du 15 septembre 1981, pris en application de l’article 78 de la loi de finances n° 61-1396 du 21 décembre 1961. Publié au Journal officiel le même jour, il a été édicté par le Premier ministre Pierre Mauroy et contresigné par le ministre délégué auprès du ministre de l’Économie et des Finances, chargé du Budget, Laurent Fabius. Si la loi de finances de 1961 visait à « consolider » et présenter les textes existants, elle n’autorisait pas expressément la création d’un livre distinct à valeur législative. Par ce décret, le gouvernement a donc étendu le champ réglementaire à des matières relevant du domaine exclusif de la loi, sans habilitation explicite du Parlement ni débat article par article.

Absence d’habilitation législative et vices de forme

L’article 78 de la loi n° 61-1396 se bornait à permettre la consolidation technique des textes fiscaux existants, sans jamais conférer au pouvoir exécutif le droit de créer de nouvelles dispositions à portée juridique contraignante. Le décret n° 81-859 du 15 septembre 1981 ne mentionne aucune habilitation expresse ni procédure de ratification ultérieure par les Assemblées. En outre, il n’a fait l’objet d’aucune commission mixte paritaire ni d’examen en séance publique article par article, ce qui constitue un vice de forme constitutif d’un excès de pouvoir. L’absence de publication consolidée au Journal officiel empêche en outre de vérifier la version authentique du texte, privant le contribuable de toute garantie de transparence.

Invocation du décret n° 63-766 du 30 juillet 1963

Pour justifier son action, le décret de 1981 renvoie au décret n° 63-766 du 30 juillet 1963, en particulier ses articles 21 et 22 relatifs à la consultation des commissions et à l’adoption de textes d’application en cas d’urgence. Toutefois, ces dispositions n’autorisaient qu’une procédure accélérée de présentation devant le Conseil d’État, sans jamais déléguer au Conseil des ministres la compétence de légiférer directement. Cette référence est donc abusivement mobilisée pour légitimer la création d’un ouvrage procédural à portée normative, alors même que le décret de 1963 ne prévoit aucune codification autonome.

La Loi n° 61-1396 du 21 décembre 1961 : Un fondement juridique illégitime

L’article 14 de cette loi s’appuie sur l’ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959, une ordonnance entrée en vigueur sans jamais être soumise à l’Assemblée nationale, promulguée alors que René Coty était encore président de la République. Cette ordonnance, abrogée en 2005, n’a jamais bénéficié d’un vote parlementaire, ce qui la rendait juridiquement fragile dès son adoption. Les articles 35 et 37 de la même loi tirent leur légitimité des mécanismes budgétaires initialisés par l’ordonnance 59-2, laquelle est aujourd’hui largement contestée en raison de son adoption irrégulière sous le gouvernement de Charles de Gaulle. Quant à l’article 58, il renvoie à l’ordonnance n° 45-1820 du 15 août 1945, promulguée par un régime d’exception sans légitimité constitutionnelle. Enfin, l’article 71 modifie une disposition de l’ordonnance n° 59-30 du 5 janvier 1959, elle aussi jamais ratifiée par l’Assemblée nationale et contraire à l’article 13 de la Constitution. Ensemble, ces références démontrent que la loi n° 61-1396 s’appuie sur des textes antérieurs dépourvus de toute validation démocratique, sapant ainsi sa propre légitimité.

L’ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959, qui définissait les règles relatives aux lois de finances sous la Cinquième République, est juridiquement nulle car elle n’a jamais été soumise à l’Assemblée nationale et a été promulguée uniquement par le Président du Conseil, Charles de Gaulle, sans approbation parlementaire. En contournant le processus législatif ordinaire, cette ordonnance a violé le principe fondamental de séparation des pouvoirs. De ce fait, la loi de finances n° 61-1396 du 21 décembre 1961, et plus précisément son article 78 qui a servi de socle au décret n° 81-859 du 15 septembre 1981, repose directement sur un texte inconstitutionnel. Si l’ordonnance 59-2 est invalidée, la loi de finances de 1961 en hérite automatiquement de cette invalidité, rendant ainsi le décret 81-859 totalement illégal et en violation flagrante de l’article 34 de la Constitution.

Invocation abusive des décisions du Conseil constitutionnel de 1980

Le décret de 1981 fait état de trois décisions successives du Conseil constitutionnel (14 mai, 24 octobre et 2 décembre 1980) pour justifier l’intervention du pouvoir réglementaire en matière fiscale. Or ces arrêts affirment au contraire le principe selon lequel « l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions relèvent du domaine de la loi ». En se réclamant de ces décisions, le gouvernement dénature leur portée et contrevient à l’esprit même de la réserve de domaine législatif consacrée à l’article 34 de la Constitution.

Une violation de l'État de droit et une fraude législative

L’État de droit repose sur le respect de la hiérarchie des normes et sur une claire séparation entre le pouvoir législatif et le pouvoir réglementaire. En permettant à un simple décret de créer ou de modifier des dispositions qui relèvent exclusivement du domaine de la loi, le décret n° 81-859 du 15 septembre 1981 outrepasse les compétences qui incombent au Parlement. En insérant des règles à portée législative dans le Livre des procédures fiscales (LPF), ce texte manifeste un excès de pouvoir et décrédibilise le principe même selon lequel seule une loi votée par les représentants du peuple peut instituer des obligations fiscales. Par conséquent, le décret 81-859 est clairement anticonstitutionnel car il empiète sur les prérogatives réservées au législateur et porte atteinte à l’État de droit.

La loi constitutionnelle du 3 juin 1958, qui fonde la Cinquième République, énonce des principes fondamentaux tels que le respect de la séparation des pouvoirs et l’organisation d’un pouvoir législatif indépendant du pouvoir réglementaire. Or, en autorisant le gouvernement à créer par décret des mesures normalement réservées au Parlement, le décret du 15 septembre 1981 efface cette distinction et méconnaît l’esprit même de la loi constitutionnelle de 1958. En conférant à un acte réglementaire la capacité de définir des règles fiscales d’application générale, il viole le principe central selon lequel la loi doit être adoptée par le Parlement. En somme, le décret 81-859 contrevient directement aux fondements juridiques et institutionnels de la Cinquième République.

On parle de fraude législative lorsque l’on utilise une norme inférieure (ici un décret) pour contourner une norme supérieure (la loi ou la Constitution). Ce procédé constitue un abus de pouvoir visant à donner une apparence de légalité à un texte dépourvu de véritable fondement juridique. En prétendant s’appuyer sur l’article 78 de la loi de finances de 1961, alors que cet article ne prévoyait qu’une refonte interne du Code général des impôts et non la création d’un nouveau texte à valeur législative, le gouvernement a détourné la procédure parlementaire. En introduisant des dispositions législatives sous couvert de codification, le décret n° 81-859 confère au LPF une force normative qu’il n’aurait pu obtenir que par une loi votée. Cette manœuvre constitue une fraude législative manifeste : le gouvernement s’est comporté comme s’il disposait d’un pouvoir législatif, alors que seuls le Parlement et la procédure d’adoption des lois pouvaient l’autoriser à légiférer sur ces sujets.

Violation de l’article 34 de la Constitution

L’article 34 de la Constitution de 1958 établit la compétence exclusive du Parlement pour fixer « l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions de toutes natures ». Or le LPF, en disposant sur les procédures de mise en recouvrement, de saisies et de contrôles, empiète directement sur ce domaine législatif. La codification de ces règles par décret constitue un excès manifeste de pouvoir et une violation de la hiérarchie des normes, contraire au principe de séparation des pouvoirs.

Publication, authenticité et valeur opposable

Contrairement aux exigences de l’article 1er du Code civil, selon lequel seuls les textes publiés au Journal officiel ont force obligatoire, le LPF n’a jamais été édité en version consolidée authentifiée. Les seules versions disponibles sont des éditions administratives diffusées par la DGFIP et des consultations en ligne sur le BOFiP, sans valeur normative propre. Cette absence d’authenticité empêche le contribuable de connaître avec certitude les dispositions applicables et crée une insécurité juridique majeure.

Modifications successives et fondements obsolètes

Le LPF est enrichi chaque année par une série de décrets d’incorporation destinés à mettre à jour ou à compléter ses dispositions procédurales. Or, ces décrets modifient ou incorporent dans la partie législative du LPF des règles relatives aux délais de recours, aux garanties du contribuable, aux procédures de saisie et de contrôle. Cette pratique est contraire à l’article 34 de la Constitution, qui réserve au législateur le soin de fixer « l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions ». Pire, ces décrets s’appuient sur l’article 11 de la loi n° 51-247 du 1er mars 1951, un texte de la IVe République aujourd’hui obsolète et incompatible avec le cadre constitutionnel en vigueur. Dans un avis du Conseil d’État du 21 février 2021, il a été souligné que « les dispositions fiscales issues de lois dont l’incorporation dans le Code général des impôts a été réalisée par des décrets pris sur le fondement de l’habilitation issue de l’article 11 de la loi n° 51-247 du 1er mars 1951 ne peuvent être regardées comme ayant été abrogées par celles qui en reprennent la substance au sein de ce code ». Cette jurisprudence confirme le caractère caduque et juridiquement fragile de toute modification législative effectuée par décret et renforce l’illégalité fondamentale du LPF.

Illégalité des Saisies Administratives à Tiers Détenteur (SATD) : fondement obsolète et contournement du domaine de la loi

L’article L. 262 du Livre des procédures fiscales, codifié en 1981, stipulait que « les dépositaires, détenteurs ou débiteurs de sommes appartenant ou devant revenir aux redevables d’impôts directs ou de taxes sur le chiffre d’affaires dont le recouvrement est garanti par le privilège du Trésor, sont tenus, sur la demande qui leur en est faite sous forme d’avis à tiers détenteur notifié par le comptable chargé du recouvrement, de verser, au lieu et place des redevables, les fonds qu’ils détiennent ou qu’ils doivent, à concurrence des impositions dues par ces redevables. Les dispositions du présent article s’appliquent également aux gérants, administrateurs, directeurs ou liquidateurs des sociétés pour les impositions dues par celles-ci ». Ce dispositif reposait certes sur un avis non contraignant, laissant au contribuable la possibilité de contester la mesure avant tout prélèvement. En instaurant, par le décret n° 2018-970, la saisie administrative à tiers détenteur (SATD) — acte unilatéral et exécutoire sans contrôle judiciaire ni débat parlementaire — l’exécutif a transformé radicalement la nature et les effets de l’article L. 262.

Or, la SATD constitue une modalité de recouvrement forcé qui relève, selon l’article 34 de la Constitution, du domaine de la loi, exclusivement attribué au Parlement. Le passage d’un simple « avis » à une saisie directe prive le contribuable d’un recours effectif et méconnaît la réserve législative sur les « modalités de recouvrement des impositions ». Faute d’une base législative authentifiée — c’est-à-dire d’une loi nouvelle instituant expressément la SATD — ce mécanisme mis en place par simple décret constitue un excès de pouvoir et viole la réserve législative de l’article 34 de la Constitution.

Décret n° 81-860 du 15 septembre 1981 : codification réglementaire illégitime

Le décret n° 81-860 du 15 septembre 1981 porte sur la codification des textes réglementaires concernant les procédures fiscales (deuxième partie : réglementaire). Cependant, il repose sur des bases juridiques déjà invalidées :

  • Il vise l’article 78 de la loi de finances n° 61-1396 du 21 décembre 1961, qui est, comme démontré précédemment, nul et sans existence légale depuis son édiction.
  • Il fait référence au décret n° 80-216 du 17 mars 1980, censé modifier le décret n° 70-223 du 17 mars 1970, mais aucune modification du décret 70-223 par le décret 80-216 n’a été publiée au Journal Officiel.
  • Il cite également le décret n° 63-766 du 30 juillet 1963, notamment son article 21 (avant-dernier alinéa), mais ce décret a été abrogé depuis le 1er janvier 2001.

Bien qu’ayant pour objectif déclaré de regrouper et d’organiser les dispositions réglementaires des procédures fiscales, le décret 81-860 dépasse largement le cadre fixé par l’article 37 de la Constitution. En effet, l’article 37 distingue le domaine réglementaire (qui relève du gouvernement) du domaine législatif (réservé au Parlement). Un décret ne peut intervenir que sur des matières qui n’appartiennent pas au domaine de la loi.

Or, les procédures fiscales ont des implications directes sur les droits et obligations des contribuables, ce qui les situe clairement dans le domaine législatif (article 34 de la Constitution). Le décret 81-860 ne se contente pas d’une simple compilation : il modifie et structure des règles fondamentales relatives aux délais de recours, garanties du contribuable et procédures de saisie, ce qui constitue une intrusion manifeste dans le domaine de la loi.

En l’absence d’une habilitation expresse du législateur pour créer ou modifier ces dispositions, le décret 81-860 est anticonstitutionnel et ne peut se justifier par l’article 37. Toute règle figurant dans cette partie réglementaire du LPF qui ne provient pas d’une loi adoptée par le Parlement est donc juridiquement nulle.

Rétrospective des manœuvres législatives et réglementaires

Depuis l’ordonnance n° 59-2 du 2 janvier 1959, une succession de détournements de procédure a permis de contourner la hiérarchie des normes et la séparation des pouvoirs. Cette ordonnance, adoptée sans validation parlementaire et contraire aux règles constitutionnelles, est devenue le socle de la loi de finances n° 61-1396 du 21 décembre 1961, laquelle fut elle-même juridiquement invalide. Dix ans plus tard, l’article 78 de cette loi a servi de prétexte pour que l’exécutif promulgue, le 15 septembre 1981, les décrets n° 81-859 et n° 81-860 instaurant le Livre des procédures fiscales (LPF), alors que seul le Parlement aurait dû édicter ces dispositions.

Le LPF, créé par simple décret, n’a jamais cessé d’être modifié et aplani chaque année par une série de décrets adossés à des bases juridiques déjà caduques : notamment l’article 11 de la loi du 1er mars 1951 (IVe République), qui est devenu obsolète après l’entrée en vigueur de la Constitution de 1958. En 2021, un avis du Conseil d’État a clairement établi que certaines dispositions fiscales anciennes, incorporées par décret dans le LPF, n’avaient jamais été expressément abrogées. Elles sont donc restées en vigueur sans reconnaissance légale, créant une fraude législative manifeste et un abus de la hiérarchie des normes.

Ce mécanisme a consisté à maintenir artificiellement en place des normes obsolètes, à imposer un régime fiscal incompatible avec la Ve République et, surtout, à priver les contribuables de toute sécurité juridique sur les règles applicables. En bout de chaîne, ce tour de passe-passe législatif a permis au service des impôts de continuer à exiger le paiement d’impôts sur la seule base d’un LPF totalement illégal, sacrifiant ainsi à la fois le principe de légalité et les droits fondamentaux inscrits dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, ainsi que dans la Convention européenne des droits de l’Homme.

Conclusion : responsabilité parlementaire et escroquerie institutionnelle

Depuis 1981, l’application du Livre des procédures fiscales repose sur des textes adoptés hors de tout cadre législatif valide. Le Parlement, en n’ayant jamais sanctionné la régularisation du LPF, porte une responsabilité pleine et entière dans cette fraude organisée. En tolérant que l’exécutif crée par décret des règles qui auraient dû être votées en séance publique, les députés et sénateurs sont complices d’une escroquerie en bande organisée qui spolie chaque citoyen français.

Chaque acte d’imposition, chaque saisie et chaque contrôle fiscal reposent sur un LPF ne disposant d’aucune base légale, ce qui viole non seulement le principe de légalité inscrit dans la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen, mais aussi les droits fondamentaux garantis par la Convention européenne des droits de l’Homme. Les contribuables sont ainsi privés du droit à un recours effectif et au respect de leurs biens, puisque l’ensemble des procédures fiscales s’appuie sur un code illégalement constitué.

Il s’agit d’une escroquerie institutionnelle systémique : le service des impôts, les juges et les administrations appliquent des règles inconstitutionnelles, imposant aux citoyens le paiement d’impôts sans fondement juridique. Cette situation, qui dure depuis plus de quarante ans, constitue une atteinte grave à l’État de droit, à la séparation des pouvoirs et aux droits de propriété. Le Parlement ne peut plus se retrancher derrière son inaction : il doit immédiatement reconnaître son manquement, annuler les dispositions du LPF contraires à la Constitution et adopter une loi de validation conforme à l’article 34 pour rétablir la légalité et la confiance des citoyens dans le système fiscal.

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