Code de la route

Code de la route – Lecture progressive

Code de la Route français : un système répressif sans base légale

SUR L’INEXISTENCE JURIDIQUE DU CODE DE LA ROUTE

Le Code de la route actuellement en vigueur en France repose sur l’ordonnance n°2000-930 du 22 septembre 2000, censée procéder à une recodification à droit constant, dans le cadre de l’habilitation prévue par la loi n°99-1071 du 16 décembre 1999. Or, cette ordonnance est entachée de multiples vices affectant sa légalité comme sa légitimité.

La présente inscription en faux a pour objet de contester la légalité du Code de la route dans son ensemble, ainsi que tous les dispositifs législatifs, réglementaires et techniques qui s’y rattachent, fondés sur des ordonnances irrégulières, des ratifications illégales, et un détournement manifeste du processus démocratique. Ce Code est fondé sur un texte d’origine frauduleuse, jamais validé dans les conditions requises par le droit constitutionnel, et ne saurait produire d’effet juridique opposable.

En effet, la prétendue recodification opérée en 2000 :

  • ne repose sur aucune base législative explicite, la loi d’habilitation ne visant à aucun moment le Code de la route ;
  • n’a pas été ratifiée par une loi votée par le Parlement dans le délai imparti par l’article 38 de la Constitution ;
  • ne respecte pas le principe de légalité des délits et des peines, en ce qu’elle modifie substantiellement des sanctions sans intervention du législateur.

Cette situation révèle une série d’irrégularités juridiques graves, affectant la légitimité même du Code de la route et de toutes les sanctions fondées sur lui. Elle ouvre la voie à une contestation globale du fondement juridique de cette codification, dans la mesure où elle repose sur un acte réglementaire déguisé, sans contrôle parlementaire, en violation directe de la Constitution française et des principes généraux du droit.

Il est expressément précisé que la présente contestation ne vise nullement à remettre en cause l’objectif légitime de sécurité routière, ni à affaiblir les politiques publiques destinées à protéger les vies humaines sur les routes. La protection des usagers, la prévention des comportements dangereux et la lutte contre les accidents restent des priorités indiscutables dans un État de droit.

En revanche, la présente inscription en faux dénonce l’instrumentalisation de cet objectif à des fins étrangères à l’intérêt général, par le biais de textes juridiquement viciés, de dispositifs répressifs déshumanisés, et de mécanismes automatisés ou privatisés, contraires aux droits fondamentaux.

Elle appelle à une refondation démocratique du droit routier, respectueuse de la légalité, du contradictoire, de la proportionnalité des peines et du consentement éclairé des citoyens.

SUR LE CADRE LÉGAL STRICT DE LA LOI D’HABILITATION DU 16 DÉCEMBRE 1999

L’habilitation donnée au Gouvernement pour légiférer par voie d’ordonnance dans le cadre de la codification repose sur la loi n°99-1071 du 16 décembre 1999, adoptée conformément à l’article 38 de la Constitution. Il s’agissait d’une autorisation exceptionnelle, strictement encadrée dans son objet, sa portée et ses limites.

Une codification à droit constant, excluant toute réforme de fond

L’article 1er de cette loi d’habilitation, dans sa version applicable à l’ordonnance n°2000-930, dispose :

« Chaque code fait l'objet d'une ordonnance. Il regroupe et organise les dispositions législatives relatives à la matière correspondante. Les dispositions codifiées sont celles en vigueur au moment de la publication des ordonnances, sous la seule réserve des modifications qui seraient rendues nécessaires pour assurer le respect de la hiérarchie des normes et la cohérence rédactionnelle des textes ainsi rassemblés et harmoniser l'état du droit. »

Ce passage est fondamental : il interdit explicitement au Gouvernement d’introduire des réformes de fond, de modifier l’équilibre juridique existant ou d’abroger unilatéralement des dispositions législatives sans les reprendre à droit constant.

L’objectif du législateur était clair : regrouper, réorganiser et clarifier les textes existants, sans en modifier le contenu substantiel. Toute atteinte à cet équilibre constituerait un excès de pouvoir, rendant l’ordonnance entachée d’incompétence manifeste, et donc juridiquement nulle.

L’ORDONNANCE N°2000-930 DU 22 SEPTEMBRE 2000 : UNE VIOLATION MANIFESTE DE LA LOI D’HABILITATION

L’ordonnance n°2000-930 du 22 septembre 2000, relative à la partie législative du Code de la route, devait, conformément à la loi d’habilitation n°99-1071 du 16 décembre 1999, procéder à une codification à droit constant, c’est-à-dire sans modification substantielle du droit existant. Or, l’analyse révèle une fraude manifeste à cette exigence, marquée par des violations majeures du mandat législatif et de la Constitution.

Dépassement frontal de la loi d’habilitation

L’article 1er de la loi d’habilitation du 16 décembre 1999 n’autorisait que la reprise à droit constant des dispositions législatives en vigueur, en permettant uniquement les adaptations nécessaires à la hiérarchie des normes ou à la cohérence rédactionnelle.

Or, loin de se borner à regrouper et réorganiser les textes existants, l’ordonnance du 22 septembre 2000 a instauré un nouveau Code de la route, avec une architecture totalement inédite (titres, chapitres, nomenclature), des concepts juridiques nouveaux, des modifications substantielles des sanctions et des procédures et des définitions d’infractions.

Ce bouleversement dépasse largement la mission de codification à droit constant, en méconnaissance directe des articles 34 et 38 de la Constitution.

Abrogation illicite du Code de la route antérieur

Substitution illégale d’un nouveau code

Par son article 5, l’ordonnance n°2000-930 du 22 septembre 2000 a procédé à l’abrogation massive de l’ensemble des dispositions législatives existantes, notamment de l’ordonnance n°58-1216 du 15 décembre 1958 (signée par Charles de Gaulle en qualité de Président du Conseil, sans dépôt régulier devant l’Assemblée nationale, en violation de la loi constitutionnelle du 3 juin 1958 et de la loi n°58-520 du même jour ; de surcroît, cette ordonnance n’a pas été promulguée conformément aux dispositions légales, qui imposaient que la promulgation des lois et ordonnances soit effectuée par le Président de la République) ainsi que de nombreuses lois postérieures (1970–1999).

Elle a ainsi supprimé tous les anciens articles législatifs L1 à L42, les anciens Titres I à VIII et les dispositions relatives à l’enseignement de la conduite, aux véhicules et aux infractions.

De plus, l’ordonnance précitée a procédé à l’abrogation illégitime de dispositifs législatifs essentiels adoptés par la loi n°89-469 du 10 juillet 1989, notamment :

  • L’instauration du permis à points, prévue par les articles L11 à L11-7 de l’ancien Code de la route, insérés par l’article 11 de la loi du 10 juillet 1989 ;
  • L’organisation du contrôle technique obligatoire des véhicules, prévue par l’article 23 de cette même loi.

Ces dispositions, issues d’une loi démocratiquement adoptée par le Parlement, engageaient des politiques publiques majeures en matière de sécurité routière et de protection de l’ordre public.

Or, en abrogeant ces textes : l’ordonnance a supprimé des dispositifs structurants du droit routier français, sans habilitation spécifique pour modifier le fond des lois existantes ; elle a vidé de leur substance des normes législatives toujours en vigueur, dont certaines, notamment les montants d’amendes, sont encore exprimées en francs en 2025, démontrant la survivance matérielle du droit antérieur ; elle a porté une atteinte manifeste au domaine réservé au Parlement, en violation directe des articles 34 et 38 de la Constitution.

Cette suppression massive et irrégulière confirme que l’ordonnance n°2000-930 n’a pas procédé à une codification à droit constant, mais à une refonte normative profonde, contraire au mandat limité confié par la loi d’habilitation n°99-1071. Plutôt que « regrouper et organiser », l’ordonnance a créé un nouveau Code ex nihilo, en violation totale de l’objet de la loi d’habilitation du 16 décembre 1999.

Dépassement manifeste du pouvoir d’habilitation

Cette substitution générale constitue une œuvre normative autonome relevant du pouvoir législatif (art. 34 Constitution), excède les prérogatives du pouvoir exécutif (art. 38 Constitution) et détourne le mandat législatif en instaurant un droit nouveau, étranger au cadre de droit constant.

Violations constitutionnelles multiples

En procédant à cette refonte sans habilitation, l’ordonnance viole l’article 38 de la Constitution (compétence limitée des ordonnances), méconnaît l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme de 1789 (légalité des délits et des peines) et porte atteinte à la séparation des pouvoirs (article 16 DDHC).

Aggravation par l’instauration d’abrogations différées

L’article 5, II de l’ordonnance, prévoyant des abrogations différées (notamment d’articles du Code général des collectivités territoriales, et de diverses lois relatives à la sécurité routière), aggravait encore l’illégalité, car elle conditionnait l’abrogation législative à un décret réglementaire, créant une insécurité juridique prohibée et usurpant la compétence du Parlement en matière d’abrogation de la loi.

Confirmation de l’illégalité par le décret n°2001-251

Le décret n°2001-251 du 22 mars 2001, pris pour établir la partie réglementaire du nouveau Code de la route, a abrogé la quasi-totalité des textes réglementaires antérieurs, notamment le décret n°58-1217 du 15 décembre 1958 relatif à la police de la circulation routière (partie réglementaire de l’ancien Code de la route). Il a entériné la disparition complète de l’ancien droit routier, et parachevé la substitution d’un nouveau dispositif normatif.

Ainsi, loin de se limiter à une simple réorganisation formelle à droit constant, l’ordonnance du 22 septembre 2000 et son décret de codification réglementaire ont instauré un nouveau régime juridique, en totale rupture avec la mission définie par la loi d’habilitation, et sans fondement constitutionnel valable.

En procédant, sous prétexte d’une codification à droit constant, à une abrogation massive des textes existants, à la création d’un nouveau Code de la route sans base législative régulière, et à l’instauration d’un nouveau régime normatif, le Gouvernement a manifestement excédé les limites de l’habilitation qui lui avait été conférée par la loi n°99-1071 du 16 décembre 1999.

Cette manœuvre constitue un détournement de procédure flagrant :

  • Une modification profonde du droit sans débat démocratique ni approbation parlementaire ;
  • Une violation directe des articles 34 et 38 de la Constitution ;
  • Une méconnaissance du principe de légalité des infractions et des peines (article 8 de la Déclaration de 1789) ;
  • Et une atteinte grave au principe fondamental de séparation des pouvoirs (article 16 de la Déclaration de 1789), en ce que l’intervention illégitime du pouvoir exécutif dans le domaine réservé au législateur anéantit l’essence même de l’État de droit.

Ces éléments suffisent à démontrer que l’ordonnance n°2000-930 est entachée d’une illégalité originelle, ayant dépassé son mandat et instauré un nouveau Code sans fondement juridique régulier.

Cependant, pour tenter de masquer cette illégalité, les autorités ont cherché à en opérer une ratification postérieure, à travers divers projets de lois, jusqu’à la loi du 12 juin 2003. Il convient donc d’analyser cette tentative de régularisation a posteriori, qui constitue en réalité une substitution illégale et un nouvel abus du pouvoir législatif.

SUR L’ABSENCE DE RATIFICATION RÉGULIÈRE ET LA FRAUDE LÉGISLATIVE DE 2003

L’ordonnance n°2000-930 du 22 septembre 2000 relative à la partie législative du Code de la route devait, conformément aux articles 1er et 2 de la loi d’habilitation n°99-1071 du 16 décembre 1999, faire l’objet d’un projet de loi de ratification déposé devant le Parlement avant le dernier jour du quatorzième mois suivant la publication de la loi d’habilitation, soit au plus tard le 16 février 2001.

Un premier projet de loi de ratification (n°2692) a été effectivement déposé à l’Assemblée nationale le 8 novembre 2000. Cependant, ce projet n’a jamais été inscrit à l’ordre du jour, ni débattu, ni voté. À la clôture de la XI législature en juin 2002, il est devenu caduc conformément aux règles parlementaires. Dès lors, l’ordonnance n°2000-930 est demeurée un acte réglementaire dépourvu de valeur législative.

Par ailleurs, un projet de loi similaire (n°318, 2001-2002) a été déposé précipitamment au Sénat le 11 juin 2002, quelques jours avant la fin de la législature. Ce dépôt n’a produit aucun effet juridique : en l’absence de transmission et d’adoption par l’Assemblée nationale élue, il ne pouvait régulariser rétroactivement l’ordonnance.

De surcroît, l’ordonnance n°2000-1255 du 21 décembre 2000, modifiant le code annexé à l’ordonnance n°2000-930, n’a jamais été soumise à ratification non plus. Elle demeure à ce jour un acte réglementaire, sans valeur législative.

Dans ce contexte, plusieurs lois, notamment la loi n°2000-516 du 15 juin 2000 et la loi n°2002-3 du 3 janvier 2002, ont modifié des dispositions figurant dans les annexes de l’ordonnance du 22 septembre 2000, bien que cette dernière n’ait jamais été ratifiée. En droit constitutionnel français, une ordonnance non ratifiée reste un acte réglementaire, et ne peut être modifiée par une loi sans ratification préalable. Ce procédé constitue une violation directe de l’article 38 de la Constitution.

La situation est d'autant plus grave qu'une loi antérieure (n°2000-516 du 15 juin 2000), censée modifier l'ancien Code de la route, est artificiellement présentée en 2003 comme modifiant le nouveau Code issu de l'ordonnance du 22 septembre 2000, laquelle n'était pourtant ni ratifiée ni valide. Cette incohérence manifeste démontre l'absence totale de rigueur juridique dans la construction du nouveau Code de la route, et révèle une violation flagrante de l'article 38 de la Constitution ainsi que du principe de sécurité juridique. Le Code de la route ainsi "bâti" repose sur une fraude manifeste au droit constitutionnel.

La situation a culminé avec la loi n°2003-495 du 12 juin 2003 "renforçant la lutte contre la violence routière". Cette loi prétend, à son article 38, ratifier l’ordonnance n°2000-930 du 22 septembre 2000. Toutefois, cette tentative est juridiquement nulle pour plusieurs raisons :

  • L’ordonnance était déjà caduque faute de ratification dans les délais impartis.
  • La loi du 12 juin 2003 n’a pas procédé à une ratification pure et simple, mais a modifié en profondeur le contenu même du Code de la route.
  • Selon la jurisprudence constitutionnelle constante, une ratification ne peut être combinée avec des modifications.

Ainsi, la loi de 2003 n'a pas validé l’ordonnance, mais a substitué à celle-ci un nouveau corpus législatif, sans respecter les exigences procédurales prévues par la Constitution.

Cette séquence illustre un détournement manifeste de la procédure d’habilitation et une atteinte grave au principe de séparation des pouvoirs, en violation directe de l’article 34 de la Constitution (compétence exclusive du Parlement en matière pénale), de l’article 38 de la Constitution (encadrement strict des ordonnances), du principe de légalité des infractions et des peines (article 8 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789), et du principe fondamental de séparation des pouvoirs (article 16 de la Déclaration de 1789).

L’article 38 de la loi du 12 juin 2003 constitue en réalité un cheval de Troie législatif. Il est utilisé pour valider a posteriori un texte (l’ordonnance n°2000-930 du 22 septembre 2000) qui n’a jamais fait l’objet d’un débat parlementaire conforme ni d’une ratification régulière dans les délais légaux. Ce procédé revient à substituer une loi de validation à une procédure de ratification prévue expressément par l’article 38 de la Constitution, dans le seul but de masquer les irrégularités antérieures. Une telle démarche viole non seulement l’esprit de la séparation des pouvoirs, mais aussi les exigences constitutionnelles relatives à l’habilitation du pouvoir exécutif. Elle ouvre un précédent extrêmement dangereux : celui de contourner le contrôle du Parlement sur les normes législatives, en créant un droit rétroactif de pure convenance politique, et non de nécessité juridique. C’est une atteinte grave à l’État de droit, à la hiérarchie des normes, et à la souveraineté populaire.

Cette manœuvre est d’autant plus préoccupante que l’ordonnance elle-même contient, en son article 2, une disposition particulièrement obscure et juridiquement problématique. En opérant une substitution automatique de références législatives sans en identifier la portée exacte, cet article prétend réécrire la loi par voie réglementaire, sans débat parlementaire, sans vote, et sans aucun contrôle normatif. Il s’agit là d’un contournement manifeste de l’article 34 de la Constitution, qui réserve l’initiative législative au Parlement, et d’une atteinte grave au principe de sécurité juridique. Une telle rédaction, aussi vague que dangereuse, confirme que l’ordonnance du 22 septembre 2000 ne peut produire d’effets valides dans un État de droit fondé sur la hiérarchie des normes et la souveraineté populaire.

Mais l’irrégularité ne s’arrête pas là. Car l’article 5 de l’ordonnance n°2000-930 du 22 septembre 2000 prétendait abroger intégralement l’ancien Code de la route, lui-même issu de l’ordonnance n°58-1216 du 15 décembre 1958.

Il est donc essentiel d’examiner la légalité de ce texte antérieur, pour constater qu’il ne constituait pas une norme législative valide. En réalité, l’ordonnance du 22 septembre 2000 a abrogé un texte juridiquement inexistant, aggravant encore la rupture du cadre légal.

SUR L’ILLÉGALITÉ ORIGINELLE DE L’ORDONNANCE N°58-1216 DU 15 DÉCEMBRE 1958 (ANCIEN CODE DE LA ROUTE)

L’ancien Code de la route, tel qu’institué par l’ordonnance n°58-1216 du 15 décembre 1958, constitue lui-même une norme juridiquement invalide. Plusieurs éléments démontrent son illégalité originelle :

Une ordonnance prise hors délai légal

La loi n°58-520 du 3 juin 1958, accordant des pouvoirs exceptionnels au Gouvernement investi le 1er juin 1958, stipulait clairement que :

« Pendant une durée de six mois à dater de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement […] prendra par décrets, dénommés ordonnances, les dispositions jugées nécessaires […]. À l’expiration du délai […] ils seront déposés sur le bureau de l’Assemblée nationale à fin de ratification. »

Le délai de six mois expirait le 3 décembre 1958. Or, l’ordonnance n°58-1216 a été signée et publiée le 15 décembre 1958, soit hors du cadre temporel d’habilitation. Cette irrégularité formelle est suffisante pour en invalider la légalité.

Promulgation irrégulière par le président du Conseil au lieu du président de la République

L’ordonnance n°58-1216 du 15 décembre 1958 a été signée et exécutée comme loi par Charles de Gaulle, en qualité de président du Conseil. Pourtant, à cette date, la Constitution du 4 octobre 1958 était en vigueur, et René Coty exerçait toujours les fonctions de Président de la République, son mandat n’ayant expiré que le 8 janvier 1959.

Or, l’article 13 de la Constitution dispose clairement :

« Le Président de la République signe les ordonnances et les décrets délibérés en Conseil des ministres. »

L’ordonnance en question a donc été signée par une autorité incompétente, en violation directe de la Constitution.

De plus, elle a été exécutée comme une loi, sans jamais avoir été déposée à l’Assemblée nationale pour ratification, contrairement à ce qu’exigeait la loi n°58-520 du 3 juin 1958. À ce titre, l’article 10 de la Constitution, qui impose que seules les « lois définitivement adoptées » soient promulguées, ne pouvait en aucun cas s’appliquer.

La promulgation de cette ordonnance par le chef du gouvernement, sans intervention du Président de la République et sans ratification parlementaire, constitue une usurpation de la fonction législative et une violation manifeste du principe de légalité et de séparation des pouvoirs (article 16 de la Déclaration de 1789).

Intervention dans un domaine prohibé par la loi d’habilitation

La loi 58-520 interdisait expressément que les ordonnances portent sur certaines matières fondamentales, notamment :

« la qualification des crimes et délits, la détermination des peines qui leur sont applicables, la procédure criminelle […]. »

Or, le Code de la route issu de l’ordonnance de 1958 :

  • qualifie des infractions (contraventions, délits routiers) ;
  • fixe les peines applicables (amendes, retraits de permis) ;
  • organise la procédure de sanction.

En intervenant dans un domaine réservé exclusivement au législateur, cette ordonnance a outrepassé l’autorisation donnée par la loi du 3 juin 1958. Elle est donc manifestement inconstitutionnelle dès l’origine.

L’article 92 de la Constitution de 1958 : une rupture illégitime du cadre constitutionnel prévu par la loi du 3 juin 1958

L’article 92 de la Constitution du 4 octobre 1958, aujourd’hui abrogé, a permis au Gouvernement de prendre seul des mesures législatives par ordonnance, sans contrôle parlementaire effectif, y compris après l’expiration de la période d’habilitation fixée par la loi n°58-520 du 3 juin 1958.

Or, cette disposition ne figurait pas parmi les principes que le Gouvernement était autorisé à mettre en œuvre dans le cadre de la loi constitutionnelle du 3 juin 1958. Cette dernière, dans son article unique, énonçait cinq principes intangibles :

  1. Seul le suffrage universel est la source du pouvoir ;
  2. Le pouvoir exécutif et le pouvoir législatif doivent être effectivement séparés ;
  3. Le Gouvernement doit être responsable devant le Parlement ;
  4. L’autorité judiciaire doit rester indépendante ;
  5. La Constitution doit organiser les rapports de la République avec les peuples associés.

Or, l’article 92 a permis au pouvoir exécutif de légiférer seul, sans Parlement, en contradiction totale avec le principe de séparation des pouvoirs (point 2), le principe de responsabilité du Gouvernement devant le Parlement (point 3) et le fondement même de la souveraineté populaire par le suffrage universel (point 1).

De plus, l’article 92 ne figurait pas dans le mandat constitutionnel de révision défini par la loi du 3 juin 1958. Il a été introduit unilatéralement par le Gouvernement, sans respecter les limites posées par la délégation exceptionnelle du pouvoir constituant. Cela constitue une modification illégale du processus constituant, violant à la fois la Constitution de 1946 encore en vigueur à ce moment, la loi n°58-520 du 3 juin 1958, et la loi constitutionnelle du 3 juin 1958 elle-même.

En conséquence, l’article 92 est entaché d’une illégalité originelle, car il repose sur un fondement juridique inexistant, contraire aux principes expressément imposés par la loi de révision. Il a servi de fondement irrégulier aux ordonnances non ratifiées, dont notamment l’ordonnance n°58-1216 du 15 décembre 1958, qui constitue la base de l’ancien Code de la route.

Elle ne figure dans aucune ordonnance de ratification postérieure

L’ordonnance n°58-1171 du 5 décembre 1958, promulguée quelques jours avant la fin du délai de six mois, prétendait ratifier une liste d’ordonnances. Or, l’ordonnance n°58-1216 est postérieure à cette date, et ne figure pas dans la liste annexée à ladite ordonnance. Aucune ratification postérieure n’a été effectuée.

Pire encore, cette tentative de ratification a été opérée par un membre de l’exécutif (Émile Pelletier), au nom du président du Conseil, ce qui est inconstitutionnel, seule l’Assemblée nationale étant habilitée à ratifier une ordonnance (article 38 de la Constitution).

Une violation directe de la loi constitutionnelle du 3 juin 1958 et des principes de la Constitution de 1946

La loi constitutionnelle du 3 juin 1958 encadrait strictement la procédure de révision de la Constitution de 1946. Elle affirmait notamment :

  1. Que seul le suffrage universel est la source du pouvoir législatif et exécutif ;
  2. Que le gouvernement devait rester responsable devant le Parlement ;
  3. Que le pouvoir exécutif et législatif devaient être effectivement séparés.

L’ensemble des éléments relevés — violation des lois d’habilitation, absence de ratification, usurpation des fonctions de promulgation, et instauration d’un pouvoir normatif unilatéral par l’exécutif — démontre qu’il ne s’est pas agi d’un simple dysfonctionnement institutionnel. C’est un véritable « hold-up constitutionnel », une confiscation du pouvoir législatif par l’exécutif, en rupture totale avec les principes de la souveraineté populaire, de séparation des pouvoirs et de légalité démocratique. Derrière une façade juridique, c’est bien un coup d’État administratif silencieux qui s’est opéré, au détriment du droit et des citoyens.

Conclusion

L’ordonnance n°58-1216 du 15 décembre 1958 est entachée d’illégalité en ce qu’elle a été prise hors du délai prévu par la loi n°58-520, jamais déposée pour ratification devant l’Assemblée nationale, promulguée par une autorité incompétente, édictée dans un domaine exclu par la loi d’habilitation, et en violation directe de la loi constitutionnelle du 3 juin 1958 ainsi que des principes fondamentaux de souveraineté populaire.

Elle constitue donc une norme juridiquement inexistante, n’ayant jamais pu acquérir de valeur législative.

Par conséquent, l’article 5 de l’ordonnance n°2000-930, qui prétend abroger l’ordonnance du 15 décembre 1958, abroge un texte lui-même inexistant en droit, révélant ainsi l’incohérence et l’illégalité de toute la refonte du Code de la route opérée en 2000.

L’illégalité du Code de la route ne résulte donc pas seulement des abus liés à l’ordonnance de 2000, mais aussi de l’irrégularité initiale de l’ordonnance de 1958 qu’elle prétendait abroger.

Pour compléter ce constat d’illégalité généralisée, il convient désormais d’examiner l’usage détourné du troisième alinéa de l’article 38 de la Constitution, utilisé comme un levier pour contourner la procédure parlementaire et donner indûment une valeur législative à un texte devenu caduc.

SUR L’USAGE ABUSIF DU TROISIÈME ALINÉA DE L’ARTICLE 38 DE LA CONSTITUTION POUR LÉGALISER UNE ORDONNANCE CADUQUE

L’application du troisième alinéa de l’article 38 de la Constitution dans ce cas précis a permis de donner une valeur législative à une ordonnance qui était devenue caduque sans que le Parlement ne l’ait expressément validée. Si ce mécanisme est prévu par la Constitution, son utilisation dans le cadre de l’ordonnance n°2000-930 du 22 septembre 2000 pose un grave problème de transparence démocratique et constitue un détournement du processus législatif.

L’ordonnance du 22 septembre 2000, ayant dépassé son délai d’habilitation sans ratification, aurait dû perdre toute valeur juridique. Or, en s’appuyant sur le troisième alinéa de l’article 38, le gouvernement impose un texte sans contrôle effectif du Parlement et avec la complicité du Conseil constitutionnel, violant ainsi le principe fondamental selon lequel seule une loi votée par les représentants du peuple peut acquérir une portée législative. Cette situation a entraîné un déséquilibre institutionnel majeur et une atteinte directe à la séparation des pouvoirs.

De plus, ce troisième alinéa entre en contradiction avec l’alinéa 2 du même article, qui impose une ratification de l’ordonnance pour qu’elle acquière une valeur législative. Cette incohérence constitutionnelle a permis à l’exécutif de contourner le contrôle parlementaire et d’imposer un texte devenu caduque par expiration du délai d’habilitation.

La fin de la législature en 2002 a automatiquement annulé le projet de loi de ratification, rendant ainsi l’ordonnance définitivement caduque. Or, cette situation a été cautionnée par la décision QPC n° 2020-843 du 28 mai 2020, où le Conseil constitutionnel a validé une dérive juridique permettant à l’exécutif d’imposer un texte sans véritable contrôle démocratique. En tolérant que des ordonnances non ratifiées puissent devenir législatives par simple expiration du délai d’habilitation, cette interprétation affaiblit le rôle du Parlement et détourne le contrôle constitutionnel en faveur du pouvoir exécutif.

Cette application abusive du troisième alinéa de l’article 38 remet en cause la stabilité juridique et l’État de droit. Elle ouvre la voie à une législation sans débat, où l’exécutif peut s’affranchir de la procédure parlementaire en laissant simplement expirer le délai prévu. Une telle utilisation de la Constitution est contraire à son objectif initial, qui est de garantir un équilibre institutionnel et un contrôle démocratique des textes législatifs.

Par ailleurs, cette pratique viole directement l’article 1 de la Constitution, qui dispose que « La France est une République indivisible, laïque, démocratique et sociale ». En excluant le Parlement du processus législatif et en permettant au gouvernement d’imposer un texte devenu caduque, cette dérive va à l’encontre du principe de souveraineté nationale, fondement de la République française. La souveraineté appartient au peuple et ne peut être détournée au profit d’une législation imposée sans vote démocratique.

Il en résulte que le Code de la route issu de cette ordonnance est inopposable aux citoyens. Son application repose sur une construction juridique viciée, dépourvue de base légale, et révèle une collusion manifeste entre les pouvoirs exécutif, législatif et judiciaire. Ce contournement du processus démocratique anéantit le principe de séparation des pouvoirs et remet en cause l’existence même de l’État de droit.

Cet usage abusif de l’article 38, alinéa 3, a ainsi ouvert la voie à une dérive encore plus préoccupante : l’édification d’un droit pénal routier d’exception, fondé sur des textes irréguliers, et consolidé par une législation prétendument sécuritaire.

C’est dans cette logique que s’inscrit la loi n°2003-495 du 12 juin 2003, dont les effets ne se limitent pas à renforcer les sanctions, mais instaurent un véritable régime de répression automatisée, contraire aux principes constitutionnels les plus fondamentaux.

SUR LES VIOLATIONS CONSTITUTIONNELLES MAJEURES INHÉRENTES À LA LOI N°2003-495 DU 12 JUIN 2003

Une loi présentée sous couvert de « sécurité routière » a effectivement marqué un tournant législatif en droit pénal routier, mais la loi n°2003-495 du 12 juin 2003, loin d’assurer un juste équilibre entre protection des usagers et garanties constitutionnelles, porte atteinte à un ensemble de principes fondamentaux ancrés dans la Constitution et les engagements internationaux de la France.

Les principales restrictions imposées

Cette loi n’a pas seulement renforcé les sanctions contre les comportements dangereux sur la route : elle a instauré un système reposant sur plusieurs piliers qui remettent en cause les droits fondamentaux.

  • Inversion de la charge de la preuve : le contrevenant est présumé coupable dès l’envoi de l’avis de contravention, à sa charge d’apporter la preuve contraire, ce qui viole le principe de présomption d’innocence.
  • Réduction drastique des garanties du contradictoire : les procédures sont entièrement dématérialisées, sans audience ni débat devant un juge, privant le citoyen de toute possibilité d’exprimer sa défense.
  • Automatisation des poursuites : de la détection à la sanction, tout est informatisé, éliminant l’intervention d’un magistrat.
  • Alourdissement des peines pour faits involontaires :
    • Jusqu’à dix ans de prison pour un homicide involontaire.
    • Jusqu’à sept ans de prison pour des blessures involontaires.
    • Suspension ou annulation du permis sans possibilité de sursis.
    • Confiscation automatique du véhicule.
  • Imposition de stages de sensibilisation payants : souvent imposés sans alternative, ces stages constituent une source de revenus publique transformée en source de profit privé.
  • Fichage massif et prolongé : toutes les données liées aux infractions sont conservées pendant dix ans, constituant un fichage étendu et disproportionné.
  • Extension des pouvoirs administratifs des préfets : ceux-ci peuvent retirer un permis ou imposer des mesures restrictives sans passage devant le juge.
  • Création d’une économie de la sanction : la collecte automatique des amendes devient un levier budgétaire, transformant la sanction en source de financement.

Par ces mesures, le droit routier se mue en droit d’exception : l’infraction n’est plus l’objet d’un jugement, mais d’un enregistrement technocratique, vidant le citoyen de son rôle actif dans le processus judiciaire. L’équilibre entre prévention, répression et respect des droits fondamentaux est rompu, instaurant un régime de surveillance et de sanction automatisée.

Le contrôle automatisé : un dispositif illégal fondé sur des textes irréguliers

Une base législative apparente, mais constitutionnellement viciée

Pour encadrer le contrôle automatisé, la loi n°2003-495 a intégré dans le Code de la route l’article L.130-9, autorisant la constatation d’infractions (excès de vitesse, non-respect d’un feu rouge, voies réservées…) par des appareils automatiques homologués. Cependant, ce texte s’insère dans un Code issu de l’ordonnance n°2000-930 du 22 septembre 2000, elle-même prise en violation de la loi d’habilitation n°99-1071 du 16 décembre 1999, puisque l’ordonnance a abrogé et remplacé l’ancien Code par un texte substantiellement nouveau, alors qu’elle ne pouvait que reprendre le droit existant à droit constant.

L’ordonnance n°2000-930 n’a jamais été ratifiée dans les délais légaux, et la loi du 12 juin 2003 a prétendu procéder à une ratification implicite, sans pour autant respecter la jurisprudence qui exige une ratification expresse préalable à toute modification. Autrement dit, le dispositif du contrôle automatisé repose sur une double fraude : une ordonnance anticonstitutionnelle et une ratification juridiquement invalide.

L’arrêté du 27 octobre 2003 : création d’un système de sanction automatisée sans base légale

L’arrêté interministériel du 27 octobre 2003, publié au Journal officiel le 29 octobre 2003, instaure le « système de contrôle sanction automatisé » (CSA). Il crée un traitement automatisé d’informations nominatives sous l’autorité du ministre de l’Intérieur qui permet :

  • La constatation des infractions par des appareils automatiques homologués.
  • La gestion automatisée de la chaîne pénale, depuis la détection jusqu’à la sanction.
  • L’enregistrement de données nominatives sensibles, y compris photographiques.
  • Le partage de ces données entre acteurs publics et privés.
  • Le croisement avec de nombreux fichiers nationaux (véhicules, permis, antécédents, etc.).
  • Une durée de conservation de dix ans, sans consentement de la personne concernée.
  • L’exclusion du droit d’opposition, pourtant garanti par la loi Informatique et Libertés, privant le citoyen de toute possibilité de contester le traitement de ses données.

En éludant le contrôle judiciaire, l’arrêté viole le principe d’un procès équitable (article 6 de la CEDH) et méconnaît l’article 34 de la Constitution qui réserve à la loi la définition des infractions, des peines et de la procédure pénale. Instaurer un régime pénal automatisé par simple arrêté réglementaire constitue une violation manifeste du principe de légalité des infractions et des peines (article 8 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen).

L’arrêté du 13 octobre 2004 et le décret n°2004-1086 : pérennisation irrégulière

L’arrêté du 13 octobre 2004 étend le CSA, transfère le Centre national de traitement (CNT) à Rennes, ouvre l’accès aux données à davantage d’acteurs et interconnecte le système à d’autres fichiers d’État (fichiers véhicules, permis, antécédents judiciaires, etc.), amplifiant ainsi l’emprise sur la vie privée des citoyens.

Le décret n°2004-1086 du 14 octobre 2004 crée le Centre automatisé de constatation des infractions routières (CACIR) à Rennes, concentrant tout le traitement pénal depuis le cliché radar jusqu’à l’émission de l’amende, sans contrôle judiciaire. Par ce texte, le législateur institutionnalise la déjudiciarisation du droit routier et instaure un modèle de sanction technocratique.

Ces textes, pris sans habilitation législative, sans débat parlementaire ni ratification, sont contraires aux exigences de l’article 34 de la Constitution. Ils instituent un traitement de données nominatives sensibles à finalité répressive, sans base constitutionnelle, et mettent en place un système de sanction industrielle, violant le principe de légalité des peines et les garanties fondamentales.

Le financement public d’un système de pénalisation automatique

« C’est avec l’argent des impôts que l’État a bâti une machine à pénaliser les citoyens, automatisée, opaque, et détournée de tout débat démocratique. »

Dès 2003, le financement initial du CSA a été inscrit dans la loi de finances, permettant l’installation des premiers radars fixes, la création du CNT à Rennes, et l’envoi automatisé des avis de contravention, le tout financé par l’impôt sans consultation ni débat. Les lois de finances suivantes ont consolidé ce financement via la mission « Contrôle et sanction automatisés ». À partir de 2011, les recettes issues des amendes radars (plus de 800 millions d’euros par an) ont été réaffectées pour développer le système : renouvellement du parc, maintenance, externalisation des véhicules-radars, et logiciels de lecture de plaques.

Les lois de finances pour 2023, 2024 et 2025 ont été adoptées par l’article 49.3, sans vote ni amendement, contournant le Parlement sur un sujet aussi sensible que le financement de la répression automatisée :

  • 2023 : plus de 200 millions d’euros pour acheter des radars tourelles, urbains et autonomes, moderniser le CNT et automatiser davantage le traitement.
  • 2024 : reconduction des crédits pour maintenir un parc de 4 600 radars, avec externalisation accrue de véhicules-radars à des entreprises privées.
  • 2025 : 46,3 millions d’euros dédiés à l’intégration de l’intelligence artificielle pour surveiller l’usage du téléphone, la ceinture de sécurité et les distances de sécurité.

Le système est désormais autofinancé par les amendes elles-mêmes : les recettes sont réparties entre le budget de l’État, l’AFITF, les collectivités territoriales et le renouvellement du parc radar. Selon la Cour des comptes, le CSA dégage un excédent net, transformant un outil de sécurité en machine à cash. Ce détournement du pacte fiscal républicain prive les citoyens de tout contrôle démocratique sur l’usage de leurs impôts.

Un système partiellement privatisé : les opérateurs commerciaux du contrôle

Une part conséquente du CSA a été confiée à des entreprises privées. Depuis 2018, plusieurs régions ont externalisé la verbalisation automatisée à des sociétés exploitant des véhicules radars banalisés. Ces entreprises gèrent la conduite des véhicules sur itinéraires prédéfinis, le déclenchement automatique de la verbalisation grâce à des systèmes embarqués et la transmission des données au CNT, sans pouvoir de police ni encadrement juridictionnel.

Financé par le budget de l’État via des marchés publics (par exemple Mobiom, Fareco, Atos), ce dispositif coûte plusieurs dizaines de millions d’euros par an sans débat démocratique sur la légitimité de déléguer à des sociétés commerciales une mission pénale. Confier la constatation d’infractions à des prestataires rémunérés au rendement menace l’impartialité, élimine le contrôle contradictoire et confond intérêt public et intérêts économiques privés.

Ainsi, le citoyen sanctionné est à la fois financeur et cible, alors que son recours devant une autorité indépendante est quasiment impossible. La verbalisation devient un processus industriel, opéré par des algorithmes et des véhicules banalisés, sans possibilité pour le justiciable de se défendre devant un juge.

Au-delà de la loi elle-même, qui masque l’irrégularité de l’ordonnance jamais ratifiée, le CSA a transformé le droit routier : dès lors, même le contrôle technique, présenté comme mesure de sécurité, s’impose sans base législative claire, bafouant les principes de légalité, de proportionnalité et de souveraineté.

SUR L’ILLÉGALITÉ DE LA VIDÉOVERBALISATION ET DE LA PRIVATISATION DU STATIONNEMENT

Une finalité sécuritaire détournée à des fins de rentabilité

Depuis plusieurs années, un nouveau volet de la répression routière s’est mis en place dans l’espace urbain : la vidéoverbalisation. Présentée comme un outil moderne de sécurité, cette technologie est en réalité un instrument opaque de contrôle, de surveillance et de taxation à distance, qui outrepasse gravement les fondements de l’État de droit.

Initialement justifiée au nom de la sécurité publique, la mise en place de caméras dans l’espace urbain devait permettre de prévenir les actes de délinquance ou d’assurer une intervention rapide des services d’urgence. Or, dans la pratique, ces dispositifs sont massivement utilisés pour verbaliser à distance des conducteurs en temps réel, sans contact, sans dialogue, sans preuve matérielle immédiate ni contradictoire.

L’automobiliste est ainsi transformé en cible invisible d’un système algorithmique, où les infractions sont constatées par des agents derrière un écran, sans contrôle juridictionnel préalable. Il ne s’agit plus d’assurer la sécurité, mais de maximiser les recettes locales en exploitant la technologie à des fins pécuniaires.

Un usage massif pour le stationnement : le forfait post-stationnement (FPS)

Avec la dépénalisation du stationnement payant, intervenue par la loi MAPTAM (loi n°2014-58 du 27 janvier 2014), les villes ont obtenu le pouvoir de fixer librement les tarifs et de confier la gestion du stationnement à des sociétés privées. Le stationnement est devenu un service local, et son non-paiement donne lieu à un forfait post-stationnement (FPS), qui remplace l’amende traditionnelle.

Ces FPS sont constatés par des agents assermentés ou, de plus en plus souvent, par des caméras embarquées à bord de véhicules ou fixées sur le mobilier urbain. Les agents, salariés d’entreprises privées, constatent à distance, rédigent les avis de paiement, et transmettent les données à des systèmes centralisés, parfois pilotés par les prestataires eux-mêmes.

Ce système déroge aux principes fondamentaux de procédure pénale : pas d’interpellation, pas de contradictoire, pas de juge, pas d’instruction. L’usager est condamné par défaut, par un dispositif automatisé, sans audience ni défense.

L’usage abusif des SATD : une exécution forcée automatisée

Pire encore, lorsque les FPS ne sont pas payés dans les délais, les collectivités locales, souvent via leur régie ou leur prestataire de gestion, déclenchent des saisies administratives à tiers détenteur (SATD). Ces saisies sont pratiquées directement sur les comptes bancaires du redevable, sans décision judiciaire, sans recours préalable effectif, et sur simple transmission informatique à la direction générale des finances publiques.

Autrement dit, une collectivité locale, sur la base d’un constat par caméra ou agent privé, peut enclencher une procédure d’exécution forcée sur les avoirs bancaires d’un particulier, sans que celui-ci n’ait été entendu, jugé, ou condamné par un tribunal.

Ce système viole frontalement les droits garantis par :

  • L’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme, relatif au droit à un procès équitable ;
  • L’article 7 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, selon lequel « nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi établie et promulguée antérieurement au délit, et légalement appliquée » ;
  • Le principe de séparation des pouvoirs, puisque des fonctions d’appréciation, de condamnation et d’exécution sont concentrées dans les mains d’autorités administratives, voire d’entreprises délégataires.

Une privatisation déguisée de la chaîne pénale

De nombreuses municipalités ont délégué la gestion du stationnement payant à des entreprises privées, dans le cadre de contrats de délégation de service public. Ces opérateurs agissent pour leur propre compte, avec une incitation financière directe liée au volume de FPS constatés ou à la rapidité du recouvrement.

L’ensemble de la chaîne — surveillance, constat, émission des FPS, gestion des recours, recouvrement — est ainsi externalisé, informatisé, et opacifié. Le citoyen n’est plus face à l’État, mais face à un système technico-commercial, organisé pour maximiser le rendement. Les sociétés concernées ont un intérêt économique à verbaliser, ce qui est incompatible avec une mission de service public neutre.

Le citoyen est ainsi sanctionné par un système qu’il finance lui-même, mais qui est exploité à des fins commerciales. La verbalisation devient une activité industrielle, pilotée par des algorithmes et des véhicules banalisés opérés par des civils, sans que le justiciable ait la possibilité de s’expliquer devant une autorité indépendante.

Au-delà de la loi elle-même, qui masque l’irrégularité de l’ordonnance jamais ratifiée, le CSA a transformé le droit routier : dès lors, même le contrôle technique, présenté comme mesure de sécurité, s’impose sans base législative claire, bafouant les principes de légalité, de proportionnalité et de souveraineté.

L’ILLÉGALITÉ DU CONTRÔLE TECHNIQUE

Le contrôle technique imposé aux propriétaires de véhicules particuliers constitue l’une des obligations administratives les plus contraignantes du Code de la route. Pourtant, un examen attentif de ses fondements juridiques révèle de graves irrégularités qui entachent sa légalité depuis sa mise en œuvre.

Absence de base législative claire

L’article 23 de la loi n° 89-469 du 10 juillet 1989 évoque uniquement les modalités d’exécution du contrôle technique « lorsqu’il est prévu par le Code de la route », mais ne crée en aucune manière l’obligation elle-même. Il ne définit ni les catégories de véhicules concernées, ni la périodicité, ni le régime de sanction. Cette disposition se borne à encadrer l’agrément des contrôleurs et à préciser que les frais sont à la charge du propriétaire. Or, en droit français, une contrainte administrative pesant sur les citoyens ne peut être instituée qu’en vertu d’une loi formelle, définissant explicitement le champ d’application, les conditions et les effets juridiques de l’obligation.

Le décret n° 91-370 du 15 avril 1991, pris en application de cet article 23, ne fait qu’organiser les procédures d’agrément, sans pour autant instituer l’obligation légale du contrôle technique. Ce décret, purement réglementaire, a ensuite été abrogé par le décret n° 2001-251 du 22 mars 2001, rendant caduques les textes qui en découlaient directement.

Illégalité de l’arrêté du 18 juin 1991

L’arrêté du 18 juin 1991 est souvent présenté comme le socle réglementaire du dispositif de contrôle technique des véhicules de moins de 3,5 tonnes. Cependant, son examen démontre une grave illégalité. Cet arrêté, signé par le ministre de l’Équipement, de l’Énergie et des Transports, se fonde sur l’article 23 de la loi précitée de 1989, sur le décret n° 91-370, mais aussi sur des articles du Code de la route alors en vigueur (R.106, R.110 à R.122, R.119-1, R.120). Or, ces dispositions réglementaires ont toutes été abrogées ou renumérotées à plusieurs reprises, et ne comportaient à l’origine aucune obligation législative de contrôle technique général.

De plus, cet arrêté n’a aucune valeur normative législative. Il ne saurait à lui seul créer une obligation pesant sur les citoyens, en l’absence de texte législatif l’y autorisant expressément, ce qui constitue une atteinte directe au principe de légalité des peines et des obligations (article 7 de la DDHC de 1789 et article 7 de la CEDH).

Fondements actuels viciés

La version actuelle du Code de la route évoque le contrôle technique aux articles L.323-1 et R.323-1 et suivants. Toutefois, ces dispositions ont été introduites par l’ordonnance n° 2000-930 du 22 septembre 2000 (modifiée ensuite) et par le décret n° 2001-251 du 22 mars 2001, qui a abrogé l’ensemble des décrets antérieurs relatifs à la police de la circulation, y compris le décret de 1991. Or, comme démontré précédemment, l’ordonnance de 2000 est entachée de nullité pour violation de la loi d’habilitation n° 99-1071 du 16 décembre 1999, excès de pouvoir et ratification illégale.

Le décret n° 2001-251 ne se contente pas de codifier : il remplace intégralement la partie réglementaire du Code de la route en abrogeant expressément 19 décrets antérieurs, dont le décret n° 91-370. Il déclare également que les dispositions annexées constituent désormais la partie réglementaire du Code de la route (article 1er) et que les références aux dispositions abrogées sont remplacées (article 2). Ce décret n’instaure toutefois aucune obligation nouvelle, se contentant d’organiser et d’annexer des dispositions codifiées déjà fragilisées dans leur légitimité, confirmant qu’aucun texte réglementaire autonome ne survit pour créer une base solide pour une obligation nationale, stable et conforme.

Inflation normative sans base législative

Les arrêtés successifs (2006–2025) ont renforcé les exigences du contrôle technique : allongement des listes de défauts, multiplication des contre-visites, réduction des délais, hausses tarifaires… Le système est devenu une machine à sanctionner financièrement les usagers pour des défauts souvent minimes (feux légèrement décalés, corrosion superficielle, traces de fuite bénigne). Cette inflation normative s’effectue sans support législatif clair, en violation flagrante du principe de proportionnalité et des droits fondamentaux des usagers.

Les articles 6 et 7 de la DDHC de 1789 rappellent que « la loi est l’expression de la volonté générale » et que « nul ne peut être accusé, arrêté ni détenu que dans les cas déterminés par la loi ». L’article 7 de la CEDH interdit toute peine ou sanction sans loi préalable. Aucun de ces standards n’est respecté par le régime actuel du contrôle technique.

Extension aux deux-roues motorisés : un surcroît d’illégalité

Depuis 2023, le contrôle technique s’applique également aux deux-roues motorisés (motos, scooters, tricycles) par voie purement réglementaire. Cet élargissement repose notamment sur l’arrêté du 23 octobre 2023, modifiant celui du 18 juin 1991. Cet arrêté se fonde sur les articles L.323-1 et R.323-1 du Code de la route, eux-mêmes issus de l’ordonnance n° 2000-930, juridiquement nulle comme démontré précédemment.

Aucune loi formelle n’a jamais été votée pour créer une obligation spécifique de contrôle technique applicable aux motos. Or, cette contrainte pèse sur la liberté de circulation, impose des frais réguliers et peut entraîner des sanctions pénales ou administratives. Elle ne peut donc être imposée sans une base législative claire, votée par le Parlement, conformément aux articles 34 et 37 de la Constitution.

L’arrêté de 2023 fixe :

  • Les catégories de véhicules concernés (à partir de 125 cm³).
  • Les dates d’entrée en vigueur (à partir de 2024 pour les plus anciens).
  • La périodicité des contrôles (tous les trois ans).
  • Les obligations à la charge du propriétaire.

Cet arrêté exerce des effets de nature législative, définissant seul les règles substantielles applicables, ce qui constitue un excès de pouvoir manifeste. De plus, sa mise en place s’est faite sans débat parlementaire ni évaluation sérieuse des impacts socio-économiques, violant les principes de proportionnalité, de légalité des obligations, ainsi que les articles 6 et 7 de la DDHC de 1789 et par l’article 7 de la CEDH.

Le Conseil d’État a été saisi à plusieurs reprises par des associations d’usagers contestant cette mesure, et le contentieux quant à la légalité du fondement réglementaire reste ouvert. Pourtant, l’administration a poursuivi la mise en œuvre de cette obligation, en dépit des incertitudes constitutionnelles majeures.

En résumé, le contrôle technique des motos souffre des mêmes vices juridiques que celui imposé aux voitures : il repose sur une simple modification réglementaire, sans fondement législatif valable, produisant des contraintes lourdes sans base conforme au droit supérieur.

Conclusion

L’ensemble du dispositif de contrôle technique, tant pour les véhicules particuliers qu’aujourd’hui pour les deux-roues motorisés, est illégal. Il repose exclusivement sur une construction réglementaire, sans fondement législatif clair et valide. Aucun texte de loi régulièrement voté par le Parlement n’a jamais instauré explicitement l’obligation générale de contrôle technique, ni défini de manière encadrée son champ d’application, sa périodicité, ses modalités ni les sanctions en cas de manquement.

Les décrets et arrêtés successifs, notamment l’arrêté du 18 juin 1991 pour les véhicules légers et l’arrêté du 23 octobre 2023 pour les deux-roues, ne sauraient suppléer l’absence de base législative. Ils ont imposé des contraintes matérielles et financières, souvent aggravées par des contre-visites abusives, sans que le législateur n’ait jamais pris position sur cette obligation. Cette dérive viole les principes de légalité des obligations (articles 34 et 37 de la Constitution), de clarté de la norme, de proportionnalité, ainsi que les garanties fondamentales posées par les articles 6 et 7 de la DDHC de 1789 et par l’article 7 de la CEDH.

En conséquence, toute verbalisation, contravention, immobilisation ou sanction découlant de ce dispositif constitue une violation manifeste du principe de légalité, une atteinte grave à la souveraineté populaire, et un détournement des instruments réglementaires à des fins répressives et financières. La logique actuelle du contrôle technique ne relève pas d’un service public au bénéfice des citoyens, mais d’un mécanisme de sanction économique systématique, imposé sans loi.

Après avoir démontré l’absence de fondement législatif du contrôle technique, son caractère abusif, discriminatoire et les dérives liées à sa privatisation déguisée, il convient d’élargir l’analyse à un autre dispositif routier imposé aux usagers sous couvert de sécurité environnementale : le régime de conversion au superéthanol E85.

Tout comme le contrôle technique, ce régime repose non pas sur une loi, mais sur une suite d’arrêtés ministériels, délégant à un acteur privé, l’UTAC, un pouvoir exorbitant d’homologation. Il conditionne la liberté d’utiliser un carburant pourtant légalement disponible à une procédure technique, coûteuse et discriminante, sans fondement démocratique ni débat parlementaire.

Il s’agit là d’une même logique administrative de contrainte indirecte, où l’usager est piégé entre obligation réglementaire, coûts privés et sanctions injustifiées. La section suivante en démontrera les irrégularités juridiques, les inégalités sociales et les dérives structurelles comparables à celles déjà relevées dans le cadre du contrôle technique.

SUR L’ILLÉGALITÉ DU RÉGIME DE CONVERSION AU SUPERÉTHANOL E85 ET DES AGRÉMENTS UTAC

Depuis 2017, les propriétaires de véhicules essence désireux d’utiliser le carburant superéthanol E85 sont soumis à un régime de conversion technique, conditionné par l’installation d’un boîtier homologué, la validation par une autorité technique, et la mise à jour du certificat d’immatriculation. Ce dispositif, présenté comme une mesure écologique, repose exclusivement sur des actes réglementaires d’origine administrative, sans fondement législatif. Il implique par ailleurs une délégation de pouvoir à une société privée – l’UTAC – exerçant un monopole de fait sur les homologations. Il en résulte une structure juridico-technique à la fois illégale, économiquement discriminante et constitutionnellement injustifiable.

Un régime sans base légale : les arrêtés à la place de la loi

Le fondement du régime de conversion au superéthanol E85 se trouve uniquement dans une série d’arrêtés ministériels, principalement l’arrêté du 30 novembre 2017, modifié par celui du 19 février 2021. Ces textes n’ont jamais été soumis à un vote parlementaire ni adossés à une loi organique. Ils ont été signés par des autorités administratives agissant par délégation — à savoir M. Laurent Michel, directeur général de l’énergie et du climat, et M. Emmanuel Barbe, délégué à la sécurité routière — et non par des membres du gouvernement exerçant une compétence ministérielle pleine. Dès lors, ces textes ne peuvent prétendre créer des obligations contraignantes pour les citoyens.

En droit français, seuls les actes législatifs ont le pouvoir de définir les infractions, d’imposer des obligations ou de restreindre les libertés individuelles. Or, ni la loi ni le Code de l’environnement ne prévoient l’obligation de convertir son véhicule pour rouler au superéthanol E85, ni ne subordonnent l’usage d’un carburant légal à une procédure d’homologation. Il en résulte une absence totale de légitimité démocratique et juridique du dispositif.

Une obligation déguisée pour un carburant pourtant légal

Le superéthanol E85 est en vente libre en France depuis le début des années 2000. En tant que carburant légalement commercialisé, il peut être utilisé à la discrétion du propriétaire d’un véhicule, sans formalité préalable. En l’état du droit, rien n’interdit à un usager de mettre dans son réservoir un carburant librement disponible, même si celui-ci n’est pas explicitement prévu par le constructeur. S’il en résulte un dommage mécanique, cette conséquence relève de sa seule responsabilité individuelle. Le droit de disposer librement de ses biens, y compris de son véhicule, est garanti par l’article 544 du Code civil.

Imposer une homologation technique, la pose d’un boîtier spécifique, et une mise à jour du certificat d’immatriculation comme condition préalable à l’usage du E85 revient à conditionner l’exercice d’une liberté individuelle à une procédure coûteuse et inutilement restrictive. Cette contrainte n’est justifiée ni par une obligation légale, ni par un risque manifeste pour autrui. Pire encore, le non-respect de cette procédure expose l’usager à des contraventions, des refus d’assurance, voire à l’immobilisation du véhicule — sanctions sans fondement législatif.

Plus grave encore, le processus d’homologation est contrôlé par une société privée — l’UTAC — qui facture aux fabricants des frais d’agrément pouvant dépasser 30 000 € par famille et catégorie de véhicules. Ce coût, prohibitif, est ensuite répercuté sur les automobilistes via des installations facturées entre 700 € et 1 600 €. Il s’agit là d’un véritable système de racket réglementaire, qui transforme l’usager en vache à lait du secteur parapublic, sans transparence ni justification proportionnée.

Dans ces conditions, la question légitime se pose de l’existence d’intérêts croisés, voire de connivences politiques ou industrielles, autour d’un régime aussi opaque qu’improductif sur le plan environnemental. La capture d’un marché contraint, par des acteurs privés soutenus par des arrêtés non débattus, constitue une atteinte grave aux libertés fondamentales.

L’UTAC : une société privée en situation de monopole de fait

L’UTAC (Union technique de l’automobile, du motocycle et du cycle) est une société par actions simplifiée (SAS), de droit privé. Depuis 2020, elle est détenue majoritairement par des investisseurs privés : le groupe Eurazeo, le FCDE (Fonds de consolidation et de développement des entreprises), et le Comité des Constructeurs Français d’Automobiles (CCFA). L’UTAC est pourtant le seul organisme habilité à réaliser les essais techniques et à délivrer les homologations nécessaires pour les boîtiers de conversion E85.

Cette situation crée un monopole de fait, sans encadrement légal, sans appel possible, et sans concurrence. Les frais d’homologation imposés aux fabricants sont souvent prohibitifs, ce qui empêche l’entrée de nouveaux acteurs sur le marché, freine l’innovation, et fausse totalement la liberté d’accès au secteur. Ce dispositif, qui délègue des fonctions quasi-régaliennes à une société à but lucratif, constitue une entorse manifeste au principe de neutralité et d’impartialité de l’action publique.

Une exclusion sociale et territoriale manifeste

Les conditions techniques imposées par les arrêtés sont particulièrement restrictives : seuls les véhicules de norme Euro 3 minimum, compatibles SP95-E10, appartenant à une « famille » validée, et modifiés par un installateur agréé, peuvent être convertis. Cette exigence exclut de facto la majorité des véhicules anciens, encore utilisés par des ménages modestes ou dans les zones rurales.

De plus, les aides financières à la conversion sont irrégulières, localisées, non pérennes, et laissées au bon vouloir des régions. Il n’existe aucun dispositif national harmonisé, ni aucune politique publique d’accompagnement équitable. Le régime de conversion E85 produit ainsi une discrimination sociale et territoriale flagrante, contraire à l’article 13 de la DDHC, qui garantit l’égalité devant les charges publiques.

Une interprétation abusive de l’article R.322-8 du Code de la route

L’article R.322-8 prévoit l’obligation de déclarer toute transformation technique affectant les données du certificat d’immatriculation. Il ne crée ni obligation de transformation, ni interdiction d’utiliser un carburant en vente libre. Or, cet article est systématiquement invoqué pour justifier des verbalisations ou des refus d’assurance, dans le cadre de l’usage du E85 sans conversion homologuée.

Cette interprétation abusive est contraire au principe de légalité des peines, selon lequel nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi précise, claire, et antérieure au fait reproché. Aucun texte législatif n’interdit l’usage du E85, et aucun ne rend obligatoire l’homologation préalable. Les sanctions infligées dans ce cadre sont donc illégales, nulles de plein droit, et contestables.

Un système instable, opaque, sans débat ni contrôle démocratique

Le régime repose sur des bases réglementaires mouvantes : les articles R.311-1 à R.318-4 du Code de la route, modifiés à plusieurs reprises, et les articles R.329-1 à R.329-25, introduits par décret en 2020. Cette évolution permanente, sans débat démocratique, sans codification claire, rend le dispositif illisible pour les citoyens et empêche tout contrôle juridictionnel effectif.

Il s’agit d’un exemple typique de gouvernance technocratique opaque, contournant les principes de sécurité juridique, d’accessibilité du droit et de transparence de l’action publique.

Une violation manifeste des principes de légalité constitutionnelle et européenne

Le régime viole frontalement les fondements juridiques de l’ordre constitutionnel et conventionnel :

  • L’article 8 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 dispose que « nul ne peut être puni qu’en vertu d’une loi ».
  • De même, l’article 7 de la Convention européenne des droits de l’homme interdit toute sanction sans base légale claire et prévisible.

Or, le régime de conversion E85 s’appuie uniquement sur des actes réglementaires, sans fondement législatif, et génère pourtant des amendes, des immobilisations, et des refus d’immatriculation. Toutes ces mesures sont donc illégales, et l’État engage sa responsabilité pour faute, son obligation de réparation des préjudices causés et, voire, la responsabilité pénale des agents publics ou autorités ayant abusé de leur pouvoir.

Un carburant ancien, historiquement libre d’usage

L’éthanol, ou alcool éthylique, est utilisé comme carburant depuis la fin du XIXe siècle. Dès 1902, le ministère de l’Agriculture en France organisait des circuits automobiles alimentés à l’alcool pour démontrer ses qualités énergétiques. De même, Henry Ford conçut en 1908 la Ford T pour fonctionner à l’éthanol, convaincu que ce carburant local et renouvelable représenterait l’avenir énergétique des peuples.

Ce n’est que dans les années 1920 et 1930, avec la découverte massive de gisements de pétrole à bas coût, que le carburant fossile supplanta l’alcool sur des critères purement économiques. L’abondance du pétrole, son rendement élevé et les possibilités de taxation facile en firent un produit centralisé, bien plus rentable pour les États et les grandes compagnies. Pourtant, d’un point de vue technique, l’éthanol n’a jamais cessé d’être un carburant viable, utilisé notamment lors des périodes de crise énergétique (guerres, chocs pétroliers). Le Brésil l’a largement démontré avec le programme PROALCOOL dans les années 70, sans que l’usage de l’éthanol soit subordonné à un boîtier ou à une homologation privée obligatoire.

Ce superéthanol E85, introduit en France bien avant 2017, s’inscrit donc dans cette continuité. Son usage est historiquement libre, techniquement connu, et ne saurait aujourd’hui être conditionné à une procédure coercitive ou à un monopole privé, sans violer le droit à la liberté d’utilisation de son bien.

Une fiscalité sur les carburants devenue une rente d’État

En France, le prix des carburants repose sur une fiscalité extrêmement lourde, organisée autour de deux principaux prélèvements : la TICPE (taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques), anciennement TIPP, et la TVA. La TICPE est une accise fixe, calculée au litre, tandis que la TVA s’applique sur le prix total, incluant déjà la TICPE. Autrement dit, l’État applique une taxe sur une taxe, ce qui constitue un mécanisme de prélèvement opaque, dénoncé de longue date pour son caractère abusif.

Ce montage fiscal a transformé les carburants en une source majeure de revenus pour l’État, représentant plusieurs dizaines de milliards d’euros chaque année. Cette dépendance budgétaire rend politiquement périlleuse toute mesure de libéralisation ou d’allégement fiscal en faveur de carburants alternatifs ou locaux, tels que l’éthanol.

Il apparaît ainsi que le contrôle strict de l’accès au E85, par le biais d’un dispositif réglementaire coûteux, contribue aussi à maintenir la rente fiscale pétrolière, en dissuadant les usagers de se détourner de l’essence traditionnelle. L’automobiliste est donc doublement victime : contraint de se conformer à une procédure injustifiée, et taxé deux fois sur des carburants dont l’usage devrait être libre.

Conclusion

Le régime de conversion au superéthanol E85 constitue un détournement manifeste de l’ordre juridique. Il repose sur un fondement réglementaire sans valeur législative, délègue des pouvoirs régaliens à un acteur privé à but lucratif, aggrave les inégalités sociales, et impose des contraintes techniques sans loi. C’est une construction illégitime, inefficace, opaque et profondément injuste.

Le point final de ce dispositif est l’exigence de modification du certificat d’immatriculation, qui devient le vecteur administratif de la contrainte. Il est donc désormais essentiel d’examiner les irrégularités du régime de la carte grise elle-même, son origine, son usage comme outil de sanction, et sa compatibilité avec les principes de droit fondamental.

RÉGIME D’IMMATRICULATION ET LA CARTE GRISE

Le régime actuel d’immatriculation des véhicules, couramment matérialisé par la « carte grise » — officiellement dénommée « certificat d’immatriculation » — constitue l’un des piliers administratifs du droit routier français. Pourtant, son fondement juridique souffre des mêmes vices que ceux dénoncés dans les sections précédentes : absence de base législative claire, illégalité des textes réglementaires successifs, et transformation d’une obligation administrative en un impôt déguisé.

Une obligation sans loi fondatrice

L’immatriculation des véhicules est une formalité administrative apparue progressivement dans les premières décennies du XXe siècle. Toutefois, aucun texte législatif spécifique ne semble avoir jamais été adopté pour encadrer, définir ou justifier l’instauration d’un « certificat d’immatriculation » payant, obligatoire et renouvelable. À ce jour, aucune loi n’a établi de façon expresse l’obligation d’immatriculer son véhicule sous peine de sanction, ni précisé la nature du titre délivré, son statut juridique, ni ses conséquences en matière de propriété.

Les textes qui encadrent l’immatriculation sont principalement d’ordre réglementaire : en particulier, l’arrêté du 5 novembre 1984, abrogé puis remplacé par l’arrêté du 9 février 2009, actuellement en vigueur. Ces arrêtés s’appuient sur des articles réglementaires du Code de la route (notamment les articles R.322-1 et suivants), eux-mêmes issus de décrets. À aucun moment une loi votée par le Parlement n’a fixé les contours de cette obligation administrative, ni justifié la perception d’une taxe variable à ce titre. Cela constitue une violation manifeste du principe constitutionnel de légalité des délits, peines, et impositions.

Une taxation inégalitaire, sans fondement législatif clair

Le coût de la carte grise repose sur une taxation calculée en fonction du nombre de chevaux fiscaux du véhicule, multipliés par un tarif fixé par région administrative, auquel s’ajoutent des frais fixes (frais de gestion, redevance d’acheminement). Ce tarif varie donc considérablement d’un département à l’autre, pour un même véhicule, sans justification rationnelle ni proportionnalité.

Or, toute imposition ou prélèvement obligatoire doit être prévu par une loi d’impôt, votée conformément aux articles 34 et 13 de la Constitution. En l’état, les certificats d’immatriculation donnent lieu à une perception tarifaire déguisée, qui échappe au régime classique des taxes et impôts, et qui est collectée sans base légale nationale uniforme.

L’usager se trouve donc contraint de payer des sommes parfois exorbitantes — plusieurs centaines d’euros — pour obtenir un document présenté comme obligatoire, sans fondement législatif et sans contrepartie réelle. Ce mécanisme s’apparente à une spoliation déguisée sous couvert d’administration.

Une confusion entretenue entre propriété et enregistrement administratif

Contrairement à d’autres documents publics (comme le titre de propriété foncière), le certificat d’immatriculation ne constitue pas un titre de propriété du véhicule. Il est présenté comme une preuve administrative d’identification, mais en pratique, il est exigé pour la revente, la circulation, l’assurance, et en cas de contrôle routier. Il devient ainsi un instrument de contrôle de propriété, sans assise juridique claire.

En outre, son statut flou permet à l’administration de conditionner, suspendre ou retirer ce document sans décision de justice (exemple : en cas de non-paiement d’amendes ou de procédures de saisie administrative), violant ainsi les droits fondamentaux du propriétaire, en dehors de tout cadre juridictionnel.

Une évolution aggravante depuis 2009

Depuis l’arrêté du 9 février 2009, le système SIV (Système d’Immatriculation des Véhicules) a introduit une centralisation informatique et un enregistrement à vie des plaques. Cette réforme a été imposée sans débat parlementaire, sans loi, et avec un renforcement des liens entre fichiers de police, fichiers fiscaux, et bases d’immatriculation. Le certificat est devenu un outil de traçabilité permanente des citoyens et de leurs biens.

Cette centralisation, opérée par des prestataires privés agréés, a externalisé la délivrance de documents administratifs essentiels à la vie quotidienne. Elle fait peser de lourdes charges sur les usagers, parfois doublées de frais de dossiers ou d’intermédiaires non contrôlés, sans que le service rendu ne justifie le coût imposé.

Un régime contraire aux principes de légalité, d’égalité et de souveraineté

L’absence de fondement législatif de cette obligation, sa mise en œuvre exclusivement par arrêté ministériel, l’inégalité tarifaire territoriale, et la privatisation des prestations associées violent plusieurs principes constitutionnels fondamentaux :

  • Le principe de légalité des obligations et des peines ;
  • Le principe d’égalité devant l’impôt et les charges publiques ;
  • Le principe de sécurité juridique ;
  • Et le principe de souveraineté individuelle du citoyen sur ses biens.

Aucune taxe ne peut être exigée sans loi. Aucun retrait d’un document essentiel à la liberté de circulation et à l’exercice de la propriété ne peut être justifié par simple voie réglementaire.

Conclusion

Le régime d’immatriculation des véhicules automobiles, tel qu’imposé en France, repose intégralement sur des textes réglementaires sans fondement législatif clair. Il constitue un dispositif opaque, inégalitaire, fiscalement abusif et juridiquement infondé. En conditionnant la liberté de circuler à la possession d’un certificat d’immatriculation payant, sans base légale précise, l’État outrepasse les limites fixées par le droit constitutionnel et supranational.

Cette obligation viole notamment :

  • L’article 17 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, qui dispose que « la propriété étant un droit inviolable et sacré, nul ne peut en être privé […] si ce n’est lorsque la nécessité publique, légalement constatée, l’exige évidemment, et sous la condition d’une juste et préalable indemnité ». Or, retirer ou suspendre une carte grise équivaut de fait à retirer l’usage du véhicule, donc à une atteinte à la propriété, sans décision judiciaire ni indemnité.
  • L’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, qui garantit le respect de la vie privée et familiale. Le fichage systématique des détenteurs de véhicules, leur traçabilité numérique par immatriculation centralisée, et les transmissions de données à des entités non judiciaires (comme l’ANTAI ou des opérateurs privés), constituent une ingérence disproportionnée dans la sphère privée des citoyens.
  • Le principe d’égalité devant les charges publiques (article 13 de la DDHC), bafoué par les écarts tarifaires injustifiés entre régions, pour un même véhicule.
  • Le principe de légalité des obligations et des sanctions (article 7 de la DDHC et article 7 de la CEDH), en ce que l’on impose une formalité contraignante et onéreuse sans texte législatif clair, ni débat démocratique.
  • Fichiers interconnectés sans information citoyenne (SNPC, FAETON, FNI…).
  • Transmission automatisée aux huissiers, administrations fiscales, collectivités locales via API informatiques, sans notification conforme.
  • Données conservées au-delà de la durée légale, sans consentement.

Par ailleurs, le régime tarifaire appliqué au certificat d’immatriculation constitue une violation manifeste des principes fondamentaux du droit fiscal français. Les taxes ou redevances exigées à l’occasion de chaque immatriculation ne sont pas prévues par une loi de finances, ni votées annuellement par le Parlement. Elles reposent en réalité sur un montage réglementaire opaque, où le tarif unitaire par cheval fiscal est déterminé par chaque région, et où diverses taxes additionnelles sont fixées par décret ou arrêté, en dehors de toute délibération parlementaire. Ce système viole directement le principe de légalité fiscale inscrit à l’article 14 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789, selon lequel nul impôt ne peut être établi que par la loi. Il contrevient également à l’article 34 de la Constitution de 1958, qui réserve au législateur la compétence exclusive pour fixer l’assiette, le taux et les modalités de recouvrement des impositions. La carte grise, loin d’être un simple titre administratif, est devenue un vecteur d’enrichissement illégal des collectivités locales, opéré au détriment des citoyens, sans fondement législatif clair, ni consentement démocratique.

Ce régime n’est pas un service public, mais un système d’extorsion modernisé, contraire à l’État de droit.

Ainsi, la question de l’immatriculation des véhicules ne se limite pas à une formalité administrative : elle est devenue l’un des maillons centraux d’un vaste système de surveillance, de traçage et de sanction automatisée. Loin de garantir la sécurité ou la régularité des déplacements, la carte grise agit désormais comme un identifiant numérique permanent, rattaché à chaque citoyen, facilitant une répression dématérialisée, souvent aveugle et sans recours effectif.

L’analyse du régime de la carte grise a révélé comment un simple document administratif, initialement destiné à l’identification des véhicules, est devenu un outil de contrôle systématique, de sanction financière et de soumission indirecte à des obligations techniques, parfois sans fondement législatif. Cette dérive s’inscrit dans une dynamique plus large, où la liberté de circulation et la propriété privée sont de plus en plus conditionnées par des décisions administratives opaques et disproportionnées.

Cette logique trouve son prolongement immédiat dans un dispositif particulièrement brutal et méconnu dans ses effets juridiques : le régime des mises en fourrière. Présenté comme un instrument de sécurité routière ou de lutte contre les infractions, il constitue en réalité un système de privation matérielle de propriété, souvent exercé sans juge, sans contradictoire, et au bénéfice d’acteurs privés sans statut défini. C’est désormais cette mécanique qu’il convient d’examiner, dans ce qu’elle révèle de la dérive autoritaire et économique du droit routier.

SUR L’ILLÉGALITÉ DU RÉGIME DES FOURRIÈRES ET LA PRIVATION ABUSIVE DE PROPRIÉTÉ

Le régime des fourrières, tel qu’il est appliqué en France, s’inscrit dans une logique de coercition administrative directe, souvent dissimulée sous une apparente nécessité d’ordre public ou de sécurité routière. En réalité, il repose sur une mécanique disproportionnée, juridiquement instable, et massivement abusive, qui viole les droits fondamentaux des citoyens, en particulier le droit de propriété. En outre, il est mis en œuvre par des opérateurs privés sans statut professionnel encadré, sur la base de simples conventions locales. Il convient ici d’en démontrer l’illégalité structurelle.

A. Un régime administratif fondé sur des textes secondaires

Le régime des fourrières est encadré par les articles L.325-1 à L.325-3 du Code de la route, complétés par une série d’articles réglementaires (R.325-1 à R.325-33) qui précisent les conditions d’enlèvement, de garde, de notification, de restitution et de vente. Pourtant, dans la majorité des cas, l’enlèvement est décidé de manière unilatérale par un agent de police ou un agent municipal, sans contrôle judiciaire préalable ni recours suspensif. Le véhicule est saisi matériellement, puis gardé par un opérateur privé. Il s’agit donc d’un dispositif d’exécution publique confié à des structures privées, sans garantie constitutionnelle d’encadrement.

B. Une atteinte manifeste au droit de propriété protégé par la Constitution

L’article 17 de la Déclaration des Droits de l’Homme et du Citoyen de 1789 établit que la propriété est un droit inviolable et sacré. Toute privation ne peut avoir lieu que dans les cas de nécessité publique, légalement constatée, et sous réserve d’une juste et préalable indemnité. Or, la mise en fourrière constitue une privation effective de l’usage d’un bien, pouvant conduire à sa destruction ou sa vente sans indemnisation. Cette atteinte, réalisée sans jugement, sans contradictoire, et souvent sans notification valable, viole ce principe fondamental. Le régime actuel assimile une mesure de police à une sanction, sans les garanties du procès équitable.

C. Une procédure opaque, asymétrique et kafkaïenne

Dans la pratique, le propriétaire est souvent informé après l’enlèvement de son véhicule, avec des délais extrêmement courts pour contester ou récupérer le bien. Les frais de garde augmentent chaque jour, rendant la récupération de plus en plus difficile, voire impossible. Aucune autorité indépendante ne vérifie la légalité de l’enlèvement avant la restitution. En cas de contestation, l’usager doit payer pour récupérer son bien avant même que le juge ne statue. Il s’agit d’un système entièrement déséquilibré, où le citoyen est écrasé par des démarches opaques, des délais arbitraires, et des frais non plafonnés.

D. Une logique de rendement économique contraire à l’intérêt général

Derrière les justifications de sécurité ou de fluidité de la circulation, le régime des fourrières dissimule une logique économique redoutablement efficace. Les communes ou les forces de l’ordre délèguent la gestion des fourrières à des prestataires privés, qui se rémunèrent sur les frais imposés aux propriétaires. L’incitation financière à multiplier les mises en fourrière est réelle, d’autant qu’aucune obligation de résultat ni de justification n’est exigée. Les tarifs appliqués varient selon les villes, sont rarement transparents, et échappent souvent à tout contrôle démocratique. Le véhicule devient une source de revenus, non un objet de droit.

E. Une privatisation déguisée d’un pouvoir de contrainte publique

Le pouvoir d’enlever un bien, de le garder, de l’immobiliser ou de le vendre relève en principe de l’autorité publique et d’un encadrement par la loi. Pourtant, ce sont ici des sociétés commerciales qui exécutent ces actes, parfois même en toute autonomie. L’État délègue à des entités sans statut régalien un pouvoir d’action quasi-régalien, sans que le Parlement n’ait jamais encadré clairement cette délégation. Il s’agit donc d’une externalisation illégitime d’une mission de souveraineté, exercée sans garde-fou et sans recours effectif. Cela constitue une atteinte grave au principe d’indivisibilité de la puissance publique.

F. Une mécanique de racket institutionnalisé

Le citoyen, privé de son véhicule sans jugement, contraint de payer des frais croissants sous peine de perte définitive, se retrouve en réalité face à un système de contrainte économique masqué. L’urgence de récupérer le véhicule, la dépendance à la mobilité, et l’absence de solution alternative font de l’usager une proie idéale. Il ne s’agit plus d’assurer la sécurité publique, mais d’imposer un prélèvement déguisé. Le régime des fourrières fonctionne ainsi comme un impôt sans base légale, sans débat parlementaire, sans proportionnalité, et sans justice. C’est un racket administratif à grande échelle.

G. Une activité exercée sans statut professionnel reconnu, fondée sur une délégation abusive

L’un des aspects les plus inquiétants du régime des fourrières réside dans l’absence totale de statut professionnel légalement reconnu pour les acteurs privés qui procèdent matériellement aux enlèvements et à la garde des véhicules. Contrairement à d’autres professions réglementées comme les huissiers, les agents de police, ou les officiers publics, il n’existe aucun métier codifié, ni dans le Code du travail, ni dans les nomenclatures INSEE ou ROME, sous l’appellation “gardien de fourrière”, “agent de mise en fourrière” ou équivalent.

En pratique, ce sont des dépanneurs, garagistes, ou entreprises de transport routier qui exécutent ces opérations. Leur légitimité repose exclusivement sur des conventions signées avec les préfectures, les mairies ou les services de police, leur conférant un pouvoir d’action quasi-régalien, sans formation spécifique ni habilitation nationale encadrée par la loi. Ce sont donc des prestataires privés agissant par simple délégation administrative, sans contrôle structurel sur leurs pratiques, leurs méthodes, ou leurs responsabilités civiles et pénales.

Cette situation crée un terrain propice à des abus massifs. Il est fréquent que les notifications soient tardives ou absentes, les véhicules soient stockés dans des conditions dégradées ou déplacés sans traçabilité, les frais soient appliqués arbitrairement, sans barème homogène, les véhicules soient démontés ou cédés avant l’expiration du délai de recours, et que l’usager n’ait aucune possibilité réelle de contester dans un délai utile.

Il s’agit là d’une privatisation déguisée de l’autorité publique, où des opérateurs non assermentés imposent une contrainte sur les biens d’autrui, hors de tout cadre juridictionnel. Cette délégation est d’autant plus préoccupante qu’elle concerne une atteinte directe au droit de propriété et une exécution sans juge, dans un domaine où l’arbitraire administratif est particulièrement courant.

En l’absence d’un statut professionnel, d’un ordre ou d’une instance nationale de régulation, le citoyen est placé dans une situation de totale insécurité juridique, à la merci d’opérateurs dont l’unique qualification peut être d’avoir répondu à un marché public ou à un appel d’offres local. Cette anomalie structurelle confirme que le régime des fourrières ne repose pas seulement sur une législation injuste : il repose aussi sur une organisation illégitime et potentiellement illégale.

Conclusion

Le régime des fourrières viole les principes constitutionnels fondamentaux, détourne l’ordre public au profit d’intérêts économiques, privatise l’exercice de la force publique, et instrumentalise les usagers de la route comme sources de revenus. Il représente une dérive institutionnelle grave, qui appelle une refonte totale.

Cette logique coercitive se prolonge dans d’autres dispositifs récents, fondés sur des arrêtés et décrets d’apparence écologique, mais qui, en réalité, organisent une nouvelle forme de ségrégation sociale et territoriale : les Zones à Faibles Émissions (ZFE) et le système Crit’Air. C’est désormais cette mécanique qu’il convient d’examiner, dans ce qu’elle révèle de la dérive autoritaire et économique du droit routier.

SUR L’ILLÉGALITÉ DES ZONES À FAIBLES ÉMISSIONS (ZFE) ET DU SYSTÈME CRIT’AIR

Le déploiement des Zones à Faibles Émissions (ZFE) et la mise en place concomitante du système d’écovignettes Crit’Air s’inscrivent dans une logique proclamée de défense de la santé publique et de la qualité de l’air. Pourtant, ces dispositifs reposent essentiellement sur des arrêtés et des décrets, sans véritable base législative claire ni débat parlementaire approfondi. Ils instaurent, de facto, une restriction de la liberté de circulation et une discrimination territoriale et sociale, en violation des principes constitutionnels fondamentaux.

A. Cadre réglementaire et absence de base législative claire

Les premières ZFE ont été instituées par simple arrêté préfectoral, sur délégation du ministère de la Transition écologique, en application des pouvoirs généraux de police administrative. Aucun texte législatif spécifique n’a été voté pour définir leur périmètre, leur régime ou leurs objectifs précis. De même, le système Crit’Air — fondé sur la classification des véhicules selon leur date de première immatriculation et la norme Euro de leur moteur — repose uniquement sur un décret et un arrêté ministériel, sans que le Parlement n’ait jamais débattu des critères retenus, des catégories établies ou des modalités de contrôle.

Or, instaurer une restriction généralisée de la circulation entre dans le champ de la loi (article 34 de la Constitution) : toute limitation affectant la liberté de déplacement doit être expressément fondée sur un texte législatif. En l’absence de loi, les arrêtés préfectoraux qui interdisent, par exemple, l’accès aux centres-villes pour les véhicules Crit’Air 4 et 5 n’ont pas de légitimité démocratique. Ces mesures uniformes, prises sans débat national ni étude d’impact approfondie, violent le principe de légalité — selon lequel nul ne peut être privé de sa liberté de circuler que par une loi précise, antérieure au fait.

B. Discrimination territoriale et sociale

La mise en œuvre des ZFE creuse un fossé entre les habitants des centres urbains, souvent plus aisés et équipés de véhicules récents, et les périphéries ou lointaines communes rurales, où circulent encore de nombreuses voitures anciennes. Pour ces derniers, passer un contrôle technique plus strict ou acquérir un véhicule neuf répondant aux critères Crit’Air peut représenter un coût prohibitif, ni prévu ni compensé par des aides nationales cohérentes. Par conséquent, les ménages à revenus modestes, obligés de conserver leur ancien véhicule pour des raisons financières, se voient exclus d’une grande part des territoires, assimilés à des pollueurs sans justification scientifique précise sur l’impact réel de chaque catégorie de moteur dans l’agglomération concernée.

En outre, les ZFE se déploient différemment d’une agglomération à l’autre : certaines villes imposent l’interdiction dès Crit’Air 3, tandis que d’autres tolèrent encore les Crit’Air 4 ou 5. Cette absence d’uniformisation législative contrevient au principe d’égalité devant la loi (article 6 de la Déclaration de 1789), car deux citoyens équipés du même véhicule peuvent, selon leur lieu de résidence, être libres de circuler ou sanctionnés d’une amende. Il en résulte une discrimination géographique arbitraire, sans que le Parlement n’ait fixé de seuil ou de calendrier national.

C. Atteinte à la liberté de circulation

La liberté de se déplacer est un droit fondamental protégé par la Constitution (article 2 de la Déclaration de 1789) et par la Convention européenne des droits de l’homme (article 2 du Protocole 4). En limitant l’accès de vastes zones urbaines aux détenteurs de vignettes Crit’Air considérées « trop polluantes », le pouvoir réglementaire porte atteinte à cette liberté, sans que la nécessité ou la proportionnalité de la mesure soit démontrée par une loi. Les objectifs affichés (réduction des émissions) auraient dû être encadrés par un débat parlementaire à même de poser des critères mesurables, des dérogations précises (pour seniors, artisans, professions médicales, etc.), et des compensations pour les déplacements indispensables.

Au lieu de cela, la décision de refuser l’accès ou d’appliquer une amende à celui qui circule sans la bonne vignette relève d’une décision administrative à portée normative, sans contrôle démocratique. En pratique, un automobiliste découvrant la signalisation routière arrive peut-être dans la ZFE sans avoir pu préalablement être informé par une campagne nationale ou locale suffisamment détaillée. Dès lors, il est verbalisé pour un motif qui n’est pas défini par la loi, mais par un arrêté préfectoral susceptible d’être modifié à tout moment.

D. Privatisation de la surveillance et du contrôle

Le contrôle effectif du respect des ZFE et de la validité des vignettes Crit’Air est souvent confié à des opérateurs privés — sociétés de vidéosurveillance, prestataires de lecture automatique de plaques ou agents verbalisateurs sous délégation municipale. Cette externalisation n’est encadrée ni par une loi, ni par un statut professionnel précis pour ces intervenants. En l’absence d’habilitation légale pour reconnaître la qualité d’« agent verbalisateur ZFE », ces opérateurs exercent un pouvoir répressif sur la seule base d’une convention de service public, sans formation judiciaire ni contradictoire réel avant l’amende.

Cette privatisation déguisée du contrôle de la circulation va à l’encontre du principe de séparation des pouvoirs (article 16 de la Déclaration de 1789) : on confie à des entités commerciales, motivées par des contrats à la mission, la possibilité de sanctionner immédiatement, sans intervention d’un agent assermenté de l’État ou d’un juge de proximité. Les procès-verbaux émis par ces prestataires ne font l’objet d’aucun vrai débat contradictoire sur place, et le recours de l’usager consiste le plus souvent à contester après coup devant le tribunal administratif ou le juge de proximité, avec des délais de traitement longs et un risque financier élevé (frais d’huissier, immobilisation du véhicule, avocat).

E. Une absence d’étude d’impact et de proportionnalité

Pour être légitime, toute mesure portant atteinte à un droit fondamental doit faire l’objet d’une étude d’impact rigoureuse. Or, ni les arrêtés ni les décrets instituant les ZFE ou le Crit’Air n’ont publié d’analyse chiffrée démontrant le lien direct entre chaque catégorie de véhicule et le niveau de pollution mesuré en zone urbaine. Les préfets ou maires se contentent de reprendre une classification européenne au prorata de l’ancienneté, sans tenir compte de l’entretien réel des moteurs, des kilométrages industriels ou des zones d’exercice (transports routiers longue distance, agriculture, artisanat).

Le principe de proportionnalité, qui exige que la restriction soit strictement nécessaire pour atteindre l’objectif poursuivi, est ainsi bafoué : on interdit aux Crit’Air 4 et 5 d’entrer sous prétexte d’améliorer la qualité de l’air, alors que les véhicules récents mal entretenus peuvent émettre davantage que certains anciens restaurés. De même, une voiture diesel Euro 5 très peu roulante pèsera moins sur le parc automobile qu’une essence mal calibrée en aire dense. En l’absence d’étude nationale ou locale, nul ne peut vérifier si l’interdiction est réellement proportionnée ou si elle relève d’une « surenchère écologique » punitive.

F. Atteinte aux principes de liberté économique et d’égalité devant l’impôt

Imposer l’obligation d’acquérir et d’apposer une vignette Crit’Air — payante, non remboursable et valable deux ans — revient à créer une taxe déguisée sur les véhicules anciens. Cette vignette, obligatoire pour circuler, coûte un montant fixé par décret (entre 3 et 4 € selon la version), sans que le Parlement n’ait encadré cet aspect financier dans la loi de finances. Ainsi, chaque détenteur d’un véhicule se voit contraint de s’acquitter d’une redevance sans débat budgétaire, en violation du principe de légalité fiscale (article 14 de la Déclaration de 1789 et article 34 de la Constitution).

De surcroît, le simple fait de devoir remplacer son véhicule pour accéder à certaines zones se transforme en contrainte économique : ceux qui n’ont pas les moyens de changer de voiture perdent leur emploi, ne peuvent plus rendre visite à des proches, ou sont contraints de payer quotidiennement un abonnement de transports en commun. Il en résulte une inégalité flagrante entre citoyens en fonction de leurs ressources, alors même que l’État n’a jamais voté de loi nationale compensant les plus modestes pour cette contrainte financière.

Conclusion

Les ZFE et le système Crit’Air, sous couvert de lutte contre la pollution, instaurent une véritable restriction de la liberté de circuler, sans base législative ni débat parlementaire. Ils organisent une discrimination territoriale et sociale, privatisent le contrôle des infractions, contournent le principe de proportionnalité et créent une taxe déguisée sur les détenteurs de véhicules anciens. En agissant ainsi par arrêté et décret, sans loi pour encadrer, fixer les critères et garantir les droits des usagers, ces dispositifs contreviennent aux articles 6 et 17 de la Déclaration de 1789, aux articles 2 et 4 du Protocole 4 de la CEDH, et au principe d’égalité devant la loi. Ils démontrent que, loin d’être de simples mesures environnementales, les ZFE et Crit’Air s’inscrivent dans une logique autoritaire et économique de privation des droits, qui appelle une remise à plat démocratique et juridique.

ANTAI : L’AUTOMATISATION ILLEGALE DE LA SANCTION

La généralisation des dispositifs de contrôle routier — radars, vidéoverbalisation, ZFE, Crit’Air — s’inscrit dans un système de répression intégralement automatisé, piloté en grande partie par l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions (ANTAI). Créée par le décret n°2011-348 du 29 mars 2011, cette structure administrative, sans base législative claire, centralise le traitement de l’ensemble des infractions routières, émet les titres exécutoires, gère les avis de contravention, et supervise le traitement des recours, en dehors de toute autorité judiciaire indépendante. Présentée comme une simple entité logistique, l’ANTAI exerce en réalité des fonctions pénales essentielles sans habilitation démocratique, consacrant une dérive vers une justice dématérialisée, opaque et privatisée.

A. Une agence administrative d’exécution pénale sans contrôle démocratique

La création de l’Agence nationale de traitement automatisé des infractions (ANTAI) par décret n°2011-348 du 29 mars 2011 s’inscrit dans la continuité de la stratégie de répression automatisée initiée en 2003. Toutefois, l’ANTAI ne résulte ni d’un débat parlementaire, ni d’une loi adoptée par les représentants du peuple. Elle est née par décret, sans fondement législatif explicite, et s’est vue confier des missions à forte portée pénale.

B. Une agence administrative sans légitimité parlementaire

L’ANTAI est un établissement public administratif placé sous la tutelle du ministère de l’Intérieur. Elle est chargée du traitement automatisé des infractions routières et délictuelles, de l’émission des titres exécutoires, de l’envoi des avis de contravention et de la gestion des systèmes de sanction automatisée.

Mais aucune loi organique n’a défini ses prérogatives pénales, alors même qu’elle intervient dans un domaine régi par l’article 34 de la Constitution.

C. Une gouvernance exclusivement exécutive, sans contrôle juridictionnel

Le conseil d’administration de l’ANTAI est composé uniquement de représentants de l’exécutif. Aucun organe indépendant (ni Parlement, ni autorité judiciaire) ne siège dans sa gouvernance. L’Agence peut pourtant déclencher des procédures pécuniaires, centraliser des données pénales et gérer des recours sans juge.

Cela contrevient aux principes constitutionnels les plus élémentaires : séparation des pouvoirs, légalité des peines, droit à un recours effectif.

D. Une rupture grave avec l’article 34 de la Constitution

L’article 34 de la Constitution réserve à la loi le soin de fixer les peines applicables et les garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques. Confier ces fonctions à une agence créée par décret constitue une violation frontale de cet article, et une dérive vers une déjudiciarisation illégitime de la sanction pénale.

E. Une chaîne pénale industrialisée, opaque et incontrôlée

Avec l’ANTAI, le pouvoir de sanction n’est plus exercé par des juges indépendants, mais par une structure administrative informatisée. Cette chaîne — du radar à l’amende — échappe au contradictoire, au débat, à la transparence et à l’intervention du citoyen. Il s’agit d’un glissement vers une bureaucratie pénale algorithmique, incompatible avec les standards démocratiques de l’État de droit.

F. Violation du Règlement général sur la protection des données (RGPD)

  • Violation des articles 5 à 7 : traitement massif de données personnelles (identité, immatriculation, lieu de l’infraction, numéro de carte grise, montant à payer) sans consentement ni information préalable.
  • Automatisation des sanctions sans contrôle humain (article 22 RGPD).
  • Absence de DPO indépendant, d’audit ou d’étude d’impact (article 35 RGPD).

« L’État ne juge plus, il programme la sanction. »

Conclusion

L’ANTAI est le pivot d’un système technocratique de sanction déshumanisée, qui automatise la répression sans véritable contrôle démocratique, constitutionnel ou juridictionnel. Ainsi, la mise en place de l’ANTAI et l’automatisation de la chaîne pénale routière s’inscrivent dans une logique de dépossession progressive du contrôle juridictionnel, en faveur d’un pilotage administratif centralisé.

Mais cette dérive technocratique repose sur un socle juridique lui-même incertain. L’un des piliers centraux de la répression routière, le permis de conduire et son système à points, présente lui aussi des fondements profondément irréguliers, tant dans son origine que dans son évolution.

LE PERMIS DE CONDUIRE : UNE SANCTION SANS LOI

Au-delà de la centralisation technocratique incarnée par l’ANTAI, il convient désormais d’examiner un autre pilier du droit routier français : le régime du permis de conduire. Ce dispositif, présenté comme un fondement indiscutable de la sécurité routière, repose en réalité sur une architecture juridique profondément instable. De son origine exclusivement réglementaire à son évolution vers le permis à points, puis à sa codification irrégulière, l’ensemble du système souffre de vices de forme et de fond, en totale contradiction avec les principes constitutionnels de légalité, de clarté de la loi et de séparation des pouvoirs.

A. Origine exclusivement réglementaire avant 1989

Avant 1989, le permis de conduire reposait entièrement sur des textes réglementaires, sans intervention du législateur :

  • Décret du 10 mars 1899 : première réglementation nationale de la circulation automobile ;
  • Décret du 27 mai 1921 : première version du Code de la route, intégrant cyclistes, piétons, attelages et automobiles ;
  • Décret du 31 décembre 1922 : le “certificat de capacité” est remplacé par un permis de conduire ;
  • Décret du 10 juillet 1954 : règlement général sur la police de la circulation, refondant le Code de la route de 1939 ;
  • Arrêté du 21 juillet 1954 : conditions de délivrance et de validité du permis, ainsi que contrôle médical pour certaines catégories ;
  • Arrêté du 20 décembre 1972 : création du Système National des Permis de Conduire (SNPC), fichier centralisé administratif.

Aucune loi n’avait, jusqu’en 1989, encadré légalement l’existence, la suspension ou l’annulation du permis de conduire. Le régime relevait entièrement du pouvoir réglementaire.

B. Tentative législative de 1989 et délégation inconstitutionnelle

La loi n° 89-469 du 10 juillet 1989 constitue la première tentative d’intégration législative du permis de conduire via l’instauration du permis à points. Elle insère dans le Code de la route les articles L.11 à L.11-7, créant un mécanisme de points affecté au permis. Cependant, cette loi ne précise pas le nombre initial de points : ce seuil est laissé à un décret d’application, contrevenant ainsi à l’article 34 de la Constitution, qui réserve au Parlement la détermination des peines et des droits civiques.

En outre, la loi prévoyait que ses articles entreraient en vigueur à une date fixée par décret en Conseil d’État, au plus tard le 1er janvier 1992. Ce calendrier n’a pas été respecté : le décret n° 92-559 du 25 juin 1992, fixant initialement le nombre de points à 6, a été publié avec retard.

C. Décrets de 1992 et absence de base législative pour le nombre de points

Le décret n° 92-559 du 25 juin 1992 instaure un capital initial de 6 points (article R.255 du Code de la route) et dresse la liste des infractions entraînant retrait de points. Quelques mois plus tard, le décret n° 92-1228 du 23 novembre 1992 porte ce seuil à 12 points. Ainsi, le nombre de points, élément central du régime punitif, n’a jamais été fixé par une loi, mais uniquement par décret, en violation des articles 34 et 37 de la Constitution.

D. Abrogation illégitime par l’ordonnance de 2000

L’ordonnance n° 2000-930 du 22 septembre 2000, prétendument prise pour codifier à droit constant, abroge l’intégralité des articles L.11 à L.20 du Code de la route, supprimant ainsi la seule assise législative du permis à points. Cette abrogation viole la loi d’habilitation n° 99-1071 du 16 décembre 1999, qui interdisait toute modification de fond, et enfreint l’article 38 de la Constitution en supprimant sans équivalent une disposition législative portant sur un droit fondamental.

Par conséquent, le permis de conduire, dans sa version actuelle, repose uniquement sur des décrets, sans base législative claire pour sa validité, sa suspension ou son annulation.

E. Violations du principe de légalité des peines

Le régime actuel du permis à points — nombre de points, barèmes de retraits, reconstitution — est entièrement fixé par voie réglementaire. Cette organisation contrevient au principe de légalité des peines (article 8 de la Déclaration de 1789) : nul ne peut être puni sans une loi précise énonçant l’infraction et la sanction. Ici, le retrait de points est décidé par une autorité administrative, sans jugement ni débat contradictoire.

F. Double sanction financière et administrative

Depuis 1992, chaque infraction routière donne lieu à deux sanctions cumulatives : une amende pécuniaire (contravention) et un retrait de points, conduisant potentiellement à l’invalidation automatique du permis. Ce cumul constitue :

  • Une violation du principe de proportionnalité des sanctions ;
  • Une atteinte au principe non bis in idem (interdiction de deux peines pour les mêmes faits) ;
  • Une absence de contrôle juridictionnel humain avant retrait de points ;
  • Une sanction administrative infligée en sus de la contravention, sans débat contradictoire ni garantie de défense.

Aucun texte législatif n’a clairement encadré cette double peine. Le système demeure mécanique, arbitraire et contraire aux standards d’un État de droit.

Conclusion : Le permis à points, une construction répressive hors-la-loi

Le permis de conduire à points, tel qu’appliqué depuis 1992, repose sur une suite de textes réglementaires et d’automatisations administratives, sans qu’aucune loi valide, claire et conforme aux principes constitutionnels n’ait jamais fondé ce système. Ni la loi du 10 juillet 1989, ni les décrets ou ordonnances subséquentes n’ont respecté les exigences de légalité, de clarté et de nécessité.

Le pouvoir de priver un citoyen de son droit de circuler librement, par simple retrait automatique de points ou invalidation mécanique du permis, constitue une atteinte grave à la liberté individuelle, au droit à une défense effective et à la sûreté. En l’absence de fondement législatif régulier, ce régime doit être reconnu comme totalement illégal : toutes les mesures de suspension, invalidation ou interdit de conduire résultant de ce système arbitraire doivent être annulées.

Il importe désormais de désigner les responsables de cette dérive et d’examiner les acteurs publics et privés ayant contribué à la généralisation de cette violation structurelle du droit.

SUR LES RESPONSABLES POLITIQUES, ADMINISTRATIFS ET INSTITUTIONNELS MIS EN CAUSE

Le système répressif issu du Code de la route, tel qu’il s’applique en France, n’est pas le fruit du hasard ou d’une dérive récente. Il résulte d’une construction progressive, méthodique, opérée depuis l’ordonnance n°58-1216 du 15 décembre 1958, texte fondateur pourtant entaché d’irrégularité constitutionnelle. Ce texte, jamais ratifié dans les délais et promulgué sans autorité légitime, constitue le socle originel vicié de tout le droit routier contemporain.

À partir de cette ordonnance illégitime, une chaîne ininterrompue de gouvernements, de ministres, de parlementaires et de hauts fonctionnaires a poursuivi, renforcé, complexifié et automatisé le système de contrainte routière. Depuis 1958, tous les exécutifs successifs ont participé à la consolidation d’un corpus de textes répressifs sans fondement législatif valide : permis de conduire, contrôle technique, carte grise, radars, amendes automatisées… Chaque réforme, chaque décret, chaque ordonnance s’est inscrite dans la continuité d’une imposture juridique, sciemment maintenue et dissimulée.

A. Responsabilité des gouvernements et ministres

Les gouvernements successifs de la Ve République jusqu’à aujourd’hui, ainsi que les ministres des Transports, de l’Intérieur et de la Justice, ont tous contribué à consolider ce cadre répressif. En promulguant ou en laissant passer sans contrôle des textes manifestement contraires aux principes de légalité et de séparation des pouvoirs, ils ont scellé leur responsabilité politique et institutionnelle dans la mise en place d’un système liberticide.

Leur silence, leur passivité ou leur complicité face aux alertes juridiques et aux mises en garde des spécialistes du droit fait d’eux des co-auteurs de cette dérive. Ils ont toléré l’instauration de dispositifs automatisés sans débat parlementaire effectif, sans évaluation sérieuse de l’impact sur les droits fondamentaux, et sans justification proportionnée.

B. Rôle du Conseil d’État et des juges administratifs

Le Conseil d’État, en qualité de conseiller du Gouvernement et juge administratif suprême, a validé à plusieurs reprises des projets législatifs et réglementaires contraires aux principes de légalité et de hiérarchie des normes. En approuvant ou en ne censurant pas des ordonnances et décrets clairement illégaux, il a entériné des textes qui excédaient le pouvoir d’habilitation ou contredisaient la Constitution.

Les juges administratifs, quant à eux, ont rejeté ou classé sans suite des recours contestant la légalité de ces mesures, souvent au motif de « bonne foi » de l’administration ou d’« intérêt général ». En méconnaissant l’exigence d’un contrôle effectif, ils ont permis la pérennisation d’un système répressif automatisé, au détriment de la protection des libertés individuelles.

C. Responsabilité des parlementaires

Les parlementaires qui ont voté, ratifié ou laissé s’appliquer des textes inconstitutionnels, ou qui n’ont pas exercé leur devoir de contrôle, portent également une responsabilité majeure. En adoptant des lois d’habilitation trop vagues, en ne surveillant pas la mise en œuvre des ordonnances et en validant des lois de ratification adjointes de modifications de fond, ils ont facilité l’édification d’un droit routier empreint d’illégalité.

Leur passivité face aux alertes juridiques, ou leur approbation tacite de mesures automatisées de sanction, révèle une collusion implicite entre intérêts politiques et logiques de rendement ou de contrôle social, au détriment de la souveraineté populaire.

D. Entreprises privées bénéficiaires

Les fournisseurs de radars, les exploitants de véhicules radars, les prestataires informatiques et autres acteurs économiques ont tiré profit d’un dispositif devenu un marché public juteux, déguisé en politique de sécurité routière. Grâce à des conventions opaques ou des marchés publics avantageux, ils ont fourni le matériel, les logiciels et les services nécessaires à l’automatisation de la répression.

Leur implication directe dans l’exécution de la sanction routière, sans contrôle judiciaire ni cadre législatif clair, en fait des acteurs responsables d’un système déshumanisé où la rentabilité prime sur l’intérêt général.

E. Implication du Conseil constitutionnel et des plus hautes juridictions

En validant, par des décisions contestables, des lois et ordonnances manifestement contraires aux principes de légalité, de proportionnalité et de séparation des pouvoirs, le Conseil constitutionnel a joué un rôle clé dans la dérive autoritaire du droit routier. Au lieu de freiner l’expansion de mesures répressives automatisées, il a légitimé une architecture juridique instable.

Les plus hautes juridictions judiciaires et administratives, en ne censurant pas ces dispositions ou en n’en ordonnant pas l’abrogation immédiate, ont également contribué à la pérennisation d’un système liberticide, en se rendant complices par leur inaction.

Conclusion

En vérité, le système répressif routier n’est pas seulement une succession d’abus réglementaires : il est le fruit d’un consensus tacite entre pouvoir exécutif, pouvoir législatif, haute administration et intérêts privés. Ce consensus s’est construit au détriment des droits fondamentaux des citoyens, dans un silence complice ou intéressé.

La Confédération Internationale des Syndicats des Droits de l’Homme pour la Justice (CISDHJ) appelle à ce que les responsabilités soient publiquement établies, que les abus soient dénoncés, et que les auteurs directs ou indirects de ce système de contrainte soient tenus juridiquement et politiquement responsables.

CONCLUSION – UNE CONSTRUCTION JURIDIQUE ILLEGITIME ET UN INSTRUMENT D’ASSERVISSEMENT MODERNE

L’ensemble du dispositif répressif issu du Code de la route repose sur une architecture juridique fondamentalement viciée depuis l’origine. L’ordonnance n°58-1216 du 15 décembre 1958, censée établir l’ancien Code de la route, a été prise hors du délai légal fixé par la loi n°58-520 du 3 juin 1958, sans ratification par le Parlement, et promulguée par une autorité incompétente en violation flagrante de la Constitution. Elle est donc juridiquement inexistante.

Ce socle illégal a été perpétué par la loi du 10 juillet 1989, qui a instauré le permis à points sans base constitutionnelle claire, déléguant au pouvoir réglementaire des prérogatives réservées au législateur, notamment la fixation du nombre de points et les conditions de retrait. Le contrôle technique obligatoire, introduit par la même loi, a été imposé sans débat ni encadrement sérieux, alors qu’il implique des obligations coûteuses et récurrentes pour les citoyens.

Puis, l’ordonnance n°2000-930 du 22 septembre 2000, prétendument prise dans le cadre d’une codification à droit constant fondée sur la loi d’habilitation n°99-1071 du 16 décembre 1999, a en réalité procédé à une refonte complète du droit routier. Elle a abrogé des lois votées, instauré de nouvelles infractions, modifié les peines et bouleversé l’organisation du Code. Jamais régulièrement ratifiée, cette ordonnance est restée un texte réglementaire jusqu’à une tentative de ratification frauduleuse en 2003 par la loi n°2003-495 — loi qui, en modifiant le contenu même du Code, ne pouvait plus opérer une ratification valide.

Depuis, le dispositif s’est durci : radars automatiques, contrôle sanction automatisé, permis à points, fichiers informatiques, agents privés… Chaque citoyen est devenu une cible potentielle d’un système punitif aveugle, automatisé, opaque, privatisé, et organisé en dehors de tout contrôle démocratique. Le tout financé par l’argent public, souvent imposé via des lois de finances adoptées sans vote parlementaire (par le 49.3), démontrant le mépris du pouvoir pour le peuple.

Autrefois, les routes de France étaient parcourues par des gendarmes bienveillants, familièrement appelés « képis », qui incarnaient une présence humaine, rassurante et pédagogique. Leur mission n’était pas de piéger, mais d’accompagner, de conseiller, de prévenir les dangers. Cette figure du gendarme de proximité, respecté et respectable, s’est effacée sous la pression d’un système fondé sur l’automatisation, les radars, les objectifs chiffrés et le rendement budgétaire. Aujourd’hui, les forces de l’ordre sont de plus en plus assignées à un rôle de sanction mécanique, souvent déshumanisé, qui trahit leur vocation première. Cette évolution n’est pas seulement une atteinte à la dignité des citoyens, mais aussi à celle des agents eux-mêmes, pris dans une logique qui les éloigne de la population et les transforme, malgré eux, en rouages d’un mécanisme de contrôle massif et aveugle.

Les gendarmes et policiers sont désormais sollicités pour participer à une logique de rendement, où le nombre de contraventions prime sur l’analyse contextuelle. Des opérations de contrôles massifs, souvent aux abords de zones piégeuses ou sur de faibles dépassements de vitesse, ne visent plus à protéger, mais à sanctionner. Cette dérive transforme des agents de la paix en collecteurs de recettes, dégradant leur lien avec la population et brouillant leur mission première.

Le rôle régalien de protection ne doit jamais être confondu avec celui d’exécuteur d’un système répressif déshumanisé. Les contrôles routiers doivent être ciblés, justifiés et proportionnés, dans le respect de la dignité des citoyens. Ce n’est qu’à cette condition que la légitimité de la force publique pourra être restaurée et que le droit reprendra sa juste place : celle de servir, et non d’asservir.

Ce système n’a jamais été conçu pour assurer la sécurité routière, mais pour générer des recettes, alimenter un marché public lucratif, et surveiller la population. Les partis politiques, gouvernements successifs, ministres, députés et sénateurs, loin de défendre les intérêts des citoyens, ont systématiquement validé, financé ou laissé prospérer ce système. Leur silence, leur passivité ou leur complicité fait d’eux les co-auteurs d’une entreprise de spoliation, de conditionnement social, et de ce qu’il convient désormais de qualifier d’esclavagisme administratif moderne.

Ce système repose en effet sur une dépendance imposée, perpétuelle, coûteuse et contraignante, appuyée par une surveillance numérique systématique, des obligations financières illimitées et des sanctions automatiques, souvent décidées sans contradictoire ni recours effectif.

Il s’agit là d’un véritable régime de dictature administrative, dans lequel le pouvoir exécutif s’est octroyé, au mépris des principes constitutionnels, le droit de légiférer seul, de sanctionner sans débat, et de soumettre le citoyen à un contrôle permanent par voie informatique, technocratique et privatisée.

Ce système ne relève plus du droit, mais de l’arbitraire. Il doit être entièrement remis en cause et dénoncé pour ce qu’il est : un dispositif de domination contemporaine, fondé sur des textes illégaux, des procédures iniques et une logique de soumission économique, contraire à l’État de droit, à la souveraineté populaire et à la dignité humaine.

Il ne s’agit plus d’un code de la route, mais d’un code de soumission, où la loi n’est plus l’expression de la volonté générale, mais l’instrument d’un asservissement programmé.

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